Finistère. ​Leurs enfants handicapés restent en IME faute de place chez les adultes (OF.fr-13/12/22)

Plusieurs parents d’enfants handicapés de plus de 20 ans se sont retrouvés à Châteaulin, jeudi 8 décembre 2022. Ils sont en attente de places adaptées aux profils de leurs enfants, dans des structures pour adultes.

Plusieurs parents d’enfants handicapés du Finistère étaient réunis à Châteaulin jeudi 8 décembre 2022. Leur collectif, qui compte une cinquantaine de familles, à travers le Finistère, dit la fatigue et l’impuissance face au manque de place en structure pour adultes.

Elles s’appellent Christine, Tiphaine, Catherine et Delphine et disent leur épuisement. Mamans d’enfants de plus de 20 ans, lourdement handicapés et dépendants, elles n’arrivent pas à avoir de place en structure adulte pour leurs proches en Finistère.

Gwendal, 24 ans, soufre du syndrome d’Angelman (retard neuro-développemental). Il vient d’effectuer sa 19e rentrée à l’IME de Plabennec. « Je rigole, désolée, s’excuse sa maman Catherine Kerbrat. Mais c’est nerveux. D’autant que tout le monde trouve cette situation absurde. »

En janvier 2020, des ennuis de santé pour elle et son mari font passer le dossier de leur fils en priorité et une place à la Maison d’accueil spécialisé (MAS) Ty-huel des Genêts d’or, à Ploudalmézeau, se profile. Patatras, en décembre 2021. Il n’y a pas assez de personnel pour l’ouverture des dix nouvelles places tant attendues. Leur fils est depuis en attente chez les « enfants ». Un pis-aller qui demande une organisation quotidienne très contrainte.

« On ne peut plus partir loin »

Idem pour Christine dont le fils de 25 ans, porteur de troubles autistiques, attend depuis cinq ans de quitter Plabennec pour une structure plus adaptée. « Faute de personnels, il y a moins d’activités. Mon fils qui s’ennuie a ainsi développé des troubles envers lui et les autres. Un jour, on m’a demandé de le prendre à la maison car il devenait dangereux. On ne peut plus partir loin. Le téléphone peut sonner à tout moment. »

Les histoires comme celles de ces deux familles sont légion, à écouter les membres du collectif de parents. Créée en 2019, cette structure informelle permet aux proches de jeunes handicapés d’échanger leurs expériences, leurs coups de blues mais aussi leurs motivations. « Ça nous réconforte, d’être entre nous et on mène des actions qu’on n’aurait pas faites seul. Mais les gouvernements, les équipes municipales et les élus passent. Tout le monde prend acte mais rien ne change. On n’a aucune perspective. »

« On a une charge mentale terrible »

Malgré la pandémie de Covid-19, les parents écrivent à leurs maires, à leurs parlementaires, à la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH), à l’Agence régionale de santé (ARS) Bretagne, à Brigitte Macron. Ils rencontrent aussi Sophie de Cluzel en déplacement à Pleyben pour la présentation du « pacte » handicap passé avec le Département de Finistère, en mars 2022.

Le projet à 17 millions d’euros promet 650 de places supplémentaires d’ici 2025. « Ce plan est super mais il n’y a personne pour s’occuper de nos enfants », regrettent les familles. Et elles disent comprendre car « les salaires et les métiers ne sont pas valorisés. Alors, quand on recroise sur le marché un ancien accompagnant qui aimait son métier et qui vous explique qu’il vit mieux aujourd’hui, oui ça fait mal. »

« Sans argent, personne ne s’engagera pour nos enfants »

« On est sous pression depuis leur naissance, poursuit Tiphaine Lamour. On a une charge mentale terrible. » « Pour nous, familles, c’est la double peine, confie Delphine Guilcher, maman de Vincent, 27 ans. Moi, j’ai peur qu’il y ait des drames. »

Les familles ont rencontré la nouvelle députée de la circonscription de Châteaulin, Mélanie Thomas, élue en juin 2022, jeudi 8 décembre 2022. Elles espèrent que la parlementaire en parlera à l’Assemblée nationale car « les salaires c’est l’État qui décide. Sans argent donné à l’ARS, personne ne s’engagera pour nos enfants. »

« Il manque 150 places en Finistère »

Ces parents de jeunes adultes en situation de handicap tirent la sonnette d’alarme, en ce mois de décembre 2022, dans le Finistère. Par manque de place dans des structures pour adultes, leurs fils et filles restent dans celles dans lesquelles ils ont passé leur enfance. Voici les réponses de Maël de Calan, président du Conseil départemental du Finistère, à ce sujet.

Des parents alertent sur le manque de place pour leurs enfants, jeunes adultes handicapés, dans les structures du Finistère. Votre réaction ?

Dans le Finistère, 150 jeunes adultes sont dans des structures pour enfants, qui ne relèvent plus de leur âge. Au-delà de ces jeunes, on estime qu’il manque 700 à 900 places en hébergement. C’est pourquoi le handicap est la priorité du mandat. On veut créer 650 places d’ici 2025, on en a déjà ouvert plus d’une centaine en 2022.

Pourquoi ces parents ne trouvent-ils pas de place, alors ?

On ne rattrape pas vingt ans de sous-investissement du jour au lendemain. Les plus faciles à ouvrir sont les places inclusives, comme des studios dans des résidences, avec un maître ou une maîtresse de maison. Mais, pour les handicaps plus lourds, il est nécessaire de bâtir de nouveaux foyers de vie et de recruter.

Justement, des parents mentionnent des places qui ne s’ouvrent finalement pas, par manque de personnel…

C’est l’une des difficultés du plan. Pour ouvrir toutes ces places, il faudra recruter, alors que le secteur est en tension. Mais on ne reste pas les bras croisés. L’augmentation de 183 € net par mois pour les professions médico-sociales, depuis le 1er avril 2022, est financée par le Département. Depuis cet été, on teste aussi la possibilité de cumuler le RSA, en plus de son salaire, dans le médico-social.

On a lancé un plan handicap ambitieux, qui crée beaucoup d’espoirs. On va, par exemple, ouvrir une nouvelle maison d’accueil spécialisée (MAS) de 80 places, mais pas avant 2025. Les familles, qui sont dans la détresse au quotidien, trouvent que ça va trop lentement. Et elles ont raison. Mais je m’engage à y mettre les moyens et l’énergie nécessaires pour régler ça rapidement.

Carole TYMEN & Julie DURAND.

source: https://www.ouest-france.fr/bretagne/chateaulin-29150/finistere-leurs-enfants-handicapes-trainent-en-ime-faute-de-place-chez-les-adultes-f988857a-7947-11ed-a535-0b8b02f1fff6

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