Florence, docteure en physique, sans emploi comme 800 autres à Nantes (OF.fr-5/01/23)

Une chercheuse en physique nantaise, 42 ans, témoigne de la difficulté de trouver un emploi après un doctorat.

Chercheurs en recherche d’emploi. À Nantes (Loire-Atlantique), 800 docteurs restent sur le carreau malgré leur doctorat. Comme Florence, Nantaise de 42 ans, physicienne, docteure en sciences des matériaux, au chômage.

Florence, 42 ans, est une physicienne passionnée. Ses yeux s’éclairent lorsqu’elle évoque les sujets pointus sur lesquels elle a bûché pendant des années, comme la résistance des matériaux. La Nantaise explique, de manière limpide, comment les atomes se déplacent sous irradiation et comment ils interagissent avec l’hélium, ce gaz noble.

Et pourtant. Malgré son diplôme de docteure obtenu en 2012, quatre ans d’études après un bac + 5, Florence est toujours sans emploi. Elle a abandonné son rêve d’être chercheuse, a repris ses études pour se reconvertir dans la transition écologique. Mais galère toujours à trouver un job. Le diplôme lui colle à la peau. Mal vu d’avoir un doctorat en France ? « Certains l’enlèvent de leur CV, de peur de ne pas décrocher le poste à cause de ça. » Sur le marché du travail, c’est, grosso modo, ingénieur, oui, docteur, non.

Scientifique dans l’âme, Florence a d’abord été attirée, jeune par l’astronomie, avant d’opter pour la radioprotection : « Je voulais être utile à la société, et il y avait eu beaucoup de cancers dans ma famille. » La radioprotection regroupe la protection des populations contre les radiations (patients), des professionnels de la santé, etc. Titulaire d’un DESS de radioprotection obtenu en 2003 à Grenoble (Isère), Florence est embauchée comme inspectrice à l’autorité de sûreté nucléaire, à Nantes.

Manque de considération

Son travail lui plaît, mais elle manque de stimulation intellectuelle. « J’avais l’impression de laisser mon cerveau dans ma voiture. » Elle quitte son emploi pour se lancer dans un master recherche sur la fusion nucléaire. Pour comprendre, c’est ce sur quoi travaillent les chercheurs engagés dans le projet d’ITER à Cadarache (Bouches-du-Rhône) dont l’objectif est de recréer l’énergie du soleil sur Terre. Florence effectue sa thèse sur la résistance des matériaux à Orléans (Loiret). Elle part ensuite en post-doctorat pendant trois ans à l’université d’Helsinki (Finlande). « Là-bas, un jeune chercheur est considéré. » De retour en France, fin 2015, pour se rapprocher de sa famille, elle enchaîne avec un autre post-doctorat à Orsay (Essonne).

Le labo dans lequel elle a fait sa thèse n’embauche pas les docteurs issus de leur formation. Or, seuls deux d’entre eux en France travaillent sur le sujet. C’est le début des galères. Contactée par un labo de Lyon (Rhône) pour son profil « mouton à cinq pattes », elle candidate avec espoir, via Google scholar, ce système mondial de marché des chercheurs avec attribution de points selon les publications. Jusqu’à ce qu’elle apprenne qu’elle est « trop vieille » pour le poste. Florence a 37 ans et fait une croix sur une carrière de chercheuse. « Si on n’a pas publié dans une revue scientifique pendant deux ans, on est considéré comme n’appartenant plus au milieu des chercheurs. Mais comment faire ? Car si on n’a pas de poste dans un labo, on ne peut pas publier. »

Se dire qu’on n’est plus rien

Démoralisée, elle se tourne vers le marché du travail « classique ». Mais les doctorants, moins bien vus que les ingénieurs, rebutent. Fin 2017, elle passe un concours administratif à l’Autorité de sûreté nucléaire. Elle le rate à deux places près. Après d’autres déconvenues, elle se reconvertit une nouvelle fois en reprenant ses études, et obtient en un an un master spécial « politiques publiques et stratégie pour l’environnement » à AgroParisTech.

Armée de ce nouveau bagage, elle cherche désespérément un emploi. Sans succès. « Moralement, c’est très dur. On m’a refusé un poste parce que j’étais trop qualifiée, un autre parce que je ne connaissais pas le logiciel utilisé. » Florence perçoit l’allocation de solidarité, 500 € par mois. Le soutien de sa famille l’aide à surmonter le vide « Le chômage isole. »

Sa rencontre avec Klask qui aide à l’inclusion en milieu professionnel, l’a reboostée. Les « expériences » menées avec d’autres chercheurs la confrontent à un sujet concret, comme avec GlobeConteur. « On s’aperçoit qu’on sait faire » , dit timidement celle qui avait fini par se dire qu’elle n’était « plus rien ».

Vanessa RIPOCHE

source: https://www.ouest-france.fr/education/etudiant/universites/florence-docteure-en-physique-sans-emploi-comme-800-autres-a-nantes-51e609d8-70b8-11ed-b658-d40122929dc2

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