Groupe d’« anti-casseurs » à Lorient : ce que l’on sait des interpellations opérées par la police (OF.fr-5/07/23)

Une trentaine de personnes a formé un groupe d’anti-casseurs, à Lorient (Morbihan), le week-end dernier (1&2 juillet)

Par Pauline DECKER

La présence d’un groupe d’anti-casseurs, lors des émeutes à Lorient (Morbihan), dans la nuit de vendredi 30 juin à samedi 1er juillet 2023, continue d’interroger. Selon des sources policières, au moins trois des quatre interpellations effectuées ont été menées par les forces de l’ordre, sans aucune aide extérieure. Le parquet de Lorient affirme n’avoir été destinataire d’aucune plainte.

Quatre personnes ont été interpellées lors des émeutes à Lorient (Morbihan), dans la nuit de vendredi 30 juin à samedi 1er juillet 2023. Comment ont été menées ces arrestations ? Par qui ? La polémique enfle après qu’un groupe d’une trentaine de jeunes anti-casseurs, formé majoritairement de militaires, a assuré avoir interpellé quatre émeutiers et les avoir livrés à la police. Une version infirmée par Géraldine Papassian, commissaire centrale de Lorient, selon qui « aucune personne arrêtée et/ou entravée n’a été livrée à des policiers ».

Cinq jours après l’épisode de violences urbaines, la présence incontestable de ce groupe venu pour prêter main-forte aux forces de l’ordre, aux méthodes particulièrement musclées, pose de nombreuses questions sur son rôle réel ce soir-là. Côté police, l’agacement est à peine voilé. « Même s’ils ont sans doute aidé à protéger quelques vitrines, leur intervention nous a plus gênés qu’autre chose. Et elle jette l’opprobre sur le commissariat alors qu’on ne mérite pas ça », assure un policier qui suit de près ce dossier. « Ce prétendu groupe d’anti-casseurs n’a pas procédé à des interpellations, comme certains de ses membres l’affirment. J’appellerais cela des bagarres, des rixes. Ce sont des violences volontaires !  »

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Deux mineurs interpellés

En l’état de la procédure, les quatre interpellations seraient donc bien le fait des forces de l’ordre. Deux mineurs ont été interpellés à hauteur de la rue Etienne-Pérault, alors qu’ils tentaient de faire un barrage avec des poubelles. « Il n’y avait aucun membre du prétendu groupe d’anti-casseurs. On leur a mis nous-mêmes les menottes », relève un policier, donnant le détail de l’interpellation en question.

Selon lui, les deux mineurs avaient été aperçus en train de mettre le feu au parasol du restaurant L’Alhambra. « Puis ils se sont enfuis dans un petit passage, où ils ont essayé d’enflammer une barricade », avant de reprendre la fuite dans l’allée entre le commissariat et le collège Brizeux. Les deux adolescents ont été appréhendés par des policiers de la sécurité publique, avec l’appui d’un équipage de la Brigade anticriminalité (BAC). Placés en garde à vue puis présentés au parquet, ils font l’objet d’un contrôle judiciaire, sous le coup d’un couvre-feu de 21 h à 6 h.

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Une interpellation par la police municipale

Un troisième individu a été interpellé vers 00 h 15, avenue du général Leclerc, à proximité de la mairie, par trois agents de la police municipale, avec notamment l’aide d’un chien. Une interpellation dont des journalistes de Ouest-France ont été les témoins. Il est reproché à l’émeutier d’avoir insulté les forces de l’ordre. Ce dernier fait l’objet d’une convocation devant le tribunal correctionnel en janvier 2024, pour les faits d’outrage et de rébellion.

Enfin, un quatrième et dernier individu a été interpellé par un équipage de la BAC, après qu’un « groupe de jeunes lui a fait barrage », concède un policier, pour qui « le jeune n’était pas à terre, ou entravé ». C’est cette interpellation que le groupe anti-casseurs pourrait avoir facilitée. Il s’agit d’un jeune majeur de 18 ans, incarcéré dans l’attente de son procès, prévu le 20 juillet 2023.

Quid des personnes attrapées par les anti-casseurs ?

Dès lors, qui sont les quatre personnes que certains membres de cette « brigade » affirment avoir arrêtées et que sont-elles devenues ? Selon nos informations, au moins deux personnes ont bien été attrapées par ce groupe anti-casseurs. L’un a été récupéré le visage en sang, rue des Fontaines ; un autre a été pris en charge par les pompiers, place Alsace-Lorraine après s’être plaint de douleurs à la hanche. Ces deux personnes n’ont pas été inquiétées par la suite. « C’est vrai que ça aurait pu être moins violent. Certains allaient un peu fort… », avait d’ailleurs reconnu auprès de Ouest-France un militaire ayant participé aux exactions. Une enquête interne a d’ailleurs été ouverte, mardi 4 juillet 2023, par la Force maritime des fusiliers marins et commandos (Forcefusco).

« Les conditions d’une enquête pénale ne sont pas réunies »

Mais aucune plainte n’a été déposée depuis. Ce que confirme le parquet de Lorient, qui indique ne disposer « en l’état, d’aucun élément concret, ni objectif, pas plus qu’il n’a été destinataire d’aucune plainte, de la part de quiconque, à ce sujet ». Il précise que les seuls éléments de procédure dont il dispose, sont « issus des quatre interpellations de police intervenues, en tout et pour tout au cours de la nuit évoquée, ne font aucune mention du sujet médiatiquement rapporté ». Et le procureur de la République de Lorient, Stéphane Kallenberger de conclure : « En l’absence d’éléments objectifs, de toute plainte et de toute saisine de mon Parquet et aussi au regard des dispositions de l’article 73 du code de procédure pénale, il apparaît que les conditions de l’ouverture d’une enquête pénale ne sont pas réunies, à ce jour ».

L’article 73 ? Il prévoit que dans les cas d’un délit flagrant puni d’une peine d’emprisonnement, toute personne a qualité pour en appréhender l’auteur et le conduire devant l’officier de police judiciaire le plus proche.

Source: https://www.ouest-france.fr/societe/faits-divers/anti-casseurs-a-lorient-ce-que-lon-sait-des-interpellations-operees-par-la-police-ec6d5af4-1b0f-11ee-8c1d-2fa30ad00bee

URL de cet article: https://lherminerouge.fr/groupe-d-anti-casseurs-a-lorient-ce-que-lon-sait-des-interpellations-operees-par-la-police-of-fr-5-07-23/

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