« La qualité des eaux du littoral ne cesse de se dégrader » dans le pays de Concarneau (OF.fr-28/08/23)

Réputé pour ses eaux transparentes, l’archipel des Glénan s’est vu, le 8 août 2023, interdit à la baignade car des analyses ont révélé une contamination par la bactérie Escherichia Coli (11000e Coli/100 ml d’eau) autour de l’île de Bananec.

Par Chloé SARTENA

Bondissement des taux de la bactérie Escherichia Coli dans l’eau de mer, prolifération de microalgues toxiques comme le Dinophysis… Cet été, la région de Concarneau est concernée par de multiples épisodes de pollution marine et d’interdictions successives de baignade et/ou de pêche à pied. Michel Beuchet nous éclaire.

Ancien enseignant en Microbiologie à l’IUT de Quimper, Michel Beuchet, membre de l’association Eau et Rivières de Bretagne et ancien membre de Bretagne Vivante, nous éclaire.

Récemment, la bactérie E. Coli a été détectée dans la commune de La Forêt-Fouesnant, et l’archipel des Glénan. La baignade a été interdite. Que pouvez-vous en dire ?

La présence d’Escherichia Coli ou de coliformes fécaux dans l’eau, signifie que l’eau est contaminée par des selles d’origine humaine ou animale. Ce sont les seuls indicateurs pris en compte pour la baignade, car dans les flores fécales sont associés des virus qui peuvent entraîner nausées, vomissements, crampes d’estomac, diarrhées ou des complications plus graves. Tous ces phénomènes d’interdiction de baignade qui se succèdent nous montrent à quel point la qualité des eaux du littoral ne cesse de se dégrader. Ces dernières décennies, avec les arasements de talus, de haies, l’artificialisation, l’imperméabilisation des surfaces, l’eau ne s’infiltre plus et va de plus en plus vite de la terre à la mer, surtout sur les bassins-versants comme ici, et lessive tout.

C’est-à-dire qu’elle récolte tout ce qu’elle trouve à la surface sur son passage ?

Absolument. Dans les champs, le lisier de porc, sur les sentiers, les déjections canines laissées par les maîtres. Au niveau des systèmes d’assainissement autonomes qui ne fonctionnent pas très bien, ou des stations d’épurations qui peuvent déborder : lorsqu’il y a de grandes saisons de pluie, le système de relèvement peut aussi être saturé. Ici à Concarneau, c’est déjà arrivé que l’eau s’accumule et que le surplus passe dans le port. Ce qui est dit, c’est que les coûts financiers pour mettre en place des systèmes plus conséquents sont trop élevés, pour un problème qui n’arrive pas chaque année. Mais cela va arriver de plus en plus fréquemment avec le réchauffement climatique. Et il faut garder en tête que la qualité des eaux de baignade ne prend pas en compte certaines pollutions, comme la pollution chimique.

Une pollution liée à l’usage des produits agricoles ?

Il y a de plus en plus de produits utilisés en fonction des cultures. Des molécules chimiques sont déversées sur les champs. Or, ces pollutions diffuses (nitrates, pesticides), engendrent des pollutions en plus sur l’eau brute – ici la rivière du Moros – qui sert ensuite à faire l’eau potable. Il n’y a pas d’étude, pas de norme. On s’est toujours plus intéressé à rechercher les infections microbiennes car les gens sont malades aussitôt, et non pas 15 ans après. Mais les conséquences sont désastreuses : cancers, Parkinson. Même si un effort est fait sur le contrôle de ces molécules chimiques, elles ne cessent de se multiplier. Les contrôler coûte cher et nécessite d’augmenter les technologies des stations pour arriver à filtrer toutes ces molécules.

Quelle serait la marche à suivre selon vous ?

Essayer de reconstituer des talus, des haies, des zones humides pour freiner, ralentir le parcours de l’eau avant qu’elle arrive à la mer. Avec Eaux et rivières de Bretagne, et d’autres associations, on participe à l’élaboration du Schéma de cohérence territoriale (SCoT), un document d’urbanisme qui participe à l’organisation du territoire de l’agglomération de Concarneau. On fixe actuellement les objectifs sur les 20 prochaines années : diminuer les rejets agricoles et des stations, les produits agricoles toxiques, le lessivage des terres et en parallèle, rétablir des freins à la circulation de l’eau.

Les efforts faits par les élus sont-ils selon vous à la hauteur ?

Il y a une problématique du contrôle. Les analyses des bactéries peuvent être plus poussées. On peut aller plus loin dans les contrôles si l’ordre est donné car le génome des entérocoques et streptocoques fécaux permet de savoir facilement si la pollution est d’origine humaine ou animale. C’est toujours le problème, on ne veut pas cibler de responsable. Les élus peuvent aller plus loin et connaître davantage l’origine.

C’est la même chose pour le toxique de dinophysis, récemment détecté dans la baie de Concarneau Fouesnant ?

Oui, cette microalgue s’avère toxique pour les consommateurs de coquillages. L’enrichissement du milieu marin en nutriments lié aux rejets participe à une prolifération trop importante. Cette neuro toxine peut entraîner des handicaps et aller jusqu’à la mort. Idem, les études ne sont pas suffisantes pour en trouver l’origine. Il y a le fait qu’on ne sache pas ou le fait qu’on ne veuille pas le dire.

Source: https://www.ouest-france.fr/bretagne/concarneau-29900/la-qualite-des-eaux-du-littoral-ne-cesse-de-se-degrader-7c00b4e6-44ea-11ee-af21-7c48bc10b688

URL de cet article: https://lherminerouge.fr/la-qualite-des-eaux-du-littoral-ne-cesse-de-se-degrader-dans-le-pays-de-concarneau-of-fr-28-08-23/

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