Le patient de la 11e heure-Billet d’humeur du Dr Christophe Prudhomme (FB-10/06/24)

Les directions des hôpitaux poussent à une organisation du travail en équipe de 12 h au lieu des trois équipes habituelles du matin, de l’après-midi et de la nuit. Leur intérêt est une gestion facilitée des plannings avec une annualisation du temps de travail permettant de diminuer les effectifs, avec un recours accru aux heures supplémentaires. Une partie du personnel, en particulier les plus jeunes travaillant de jour, sont particulièrement favorables à cette évolution car cela correspond à leur aspiration à limiter le nombre de jours de présence, diminuant ainsi les temps de transport et générant un plus grand nombre de jours de repos. Pour certains, il s’agit aussi, devant la faiblesse des salaires, de pouvoir cumuler plus facilement un deuxième emploi. Pourtant de nombreux éléments prouvent le caractère néfaste de ce rythme de travail. Il existe notamment une étude publiée par l’association des médecins du travail des hôpitaux qui montre les effets négatifs du travail en 12 h pour la santé des agents. Par ailleurs, ce rythme de travail est rapidement abandonné par les personnels devant les difficultés générées dans l’organisation de la vie familiale, notamment pour les enfants dans des métiers à 80 % féminin. Il existe également des tensions entre les équipes de jour favorables au travail en 12 h et les équipes de nuit qui souhaitent conserver leur rythme de travail en 10 h, ce d’autant que sa pénibilité est compensée par une réduction de la semaine de travail à 32 h. Par ailleurs, devant les difficultés croissantes de recrutement de personnel de nuit, il est de plus en plus souvent demandé une alternance du rythme jour/nuit au cours de l’année à l’ensemble des agents, ce qui est encore plus destructeur pour la santé et la vie personnelle. A moyen terme, les conséquences sont catastrophiques pour les hôpitaux avec une fuite du personnel qui demande à changer de poste ou quitte l’hôpital, ne pouvant supporter ce rythme de travail plus de quelques années.

Mais ce qui est plus grave et est négligé par les directions, ce sont les conséquences potentielles pour les patients. En effet, qui aujourd’hui peut décemment affirmer que la vigilance ainsi que la disponibilité physique et intellectuelle peuvent être maintenue pendant ces plages de travail prolongées. Ce d’autant que la nécessaire transmission des informations d’une équipe à l’autre implique forcément un temps de chevauchement allongeant la durée de présence au-delà de 12 h. A cela s’ajoute, l’intensification du travail à l’hôpital du fait de la réduction des durées d’hospitalisation, de la diminution du nombre de lits et de la complexification des soins, qui réduisent les plages de repos potentielles dans la journée à leur plus simple expression, avec parfois l’impossibilité même de pouvoir se ménager une plage de repos pour le repas. Alors la question qui se pose pour les patients dans ces conditions : voulez-vous vraiment être le patient de la 11e heure ? La réponse est sûrement non. Alors la bonne solution pour les patients et les personnels est celle de la semaine de 32 h sur 4 jours.

Dr Christophe Prudhomme

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Source: https://www.facebook.com/christopheprudhomme93/posts/pfbid0UtSqHfTXQRSqC7rWUuqEePG1RAKDE1u6Xv2MbG4aTKyGidVqyy2kXZRSjbJLDZWMl

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