Loire-Atlantique-Les Algues vertes, un scandale sanitaire… et un film qui sort ce mercredi 12 juillet 2023(OF.fr-12/07/23)

Pierre Jolivet, le réalisateur.

Entretien réalisé par Théophile PECHON (Presse Océan)

Des plages d’algues vertes : c’est le même constat chaque année en Bretagne. Le réalisateur Pierre Jolivet revient sur ce désastre écologique et social dans une fiction au cinéma.

Le film Les Algues vertes sort en salle ce mercredi 12 juillet 2023. Sujet sensible en Bretagne, adapté de la bande dessinée Algues vertes, l’histoire interdite, d’Inès Léraud, le film retrace les trois années d’enquête de la journaliste et lanceuse d’alerte. Inès Léraud est coscénariste du film. Le tournage a duré six semaines. Rencontre avec Pierre Jolivet, le réalisateur.

Presse Océan : qu’est-ce qui vous a amené à traiter du phénomène des algues vertes ?

Pierre Jolivet : « Mon challenge était de faire de la réalité de ce phénomène une fiction. Il y avait les morts, le suspense, une omerta et le destin d’une jeune femme. Il y avait tout ce qu’il fallait pour faire un bon film. La bande dessinée d’Inès a été une source fantastique d’information. Inès a apporté une humanité à la bande dessinée. Elle m’a raconté des situations qu’elle n’avait pas décrites dans sa BD et qui lui étaient arrivés à titre personnel. Il fallait que je sélectionne les plus intéressantes pour la narration afin d’en faire un vrai film de cinéma ».

Parler des algues vertes en Bretagne, est-ce un tabou ?

« En Bretagne, les algues vertes sont un schisme. C’est un vrai problème et cela fracture la Bretagne. Une grande partie des habitants vivent de l’agro-industrie et une grande partie souffrent de cette agro-industrie. Cela rend la région assez douloureuse. »

Avez-vous eu des difficultés de tournage ?

« C’est mon dix-huitième film. C’est la première fois de ma vie qu’on m’a interdit de tourner dans plusieurs endroits. En Bretagne, il ne faut plus parler des algues vertes. Durant le tournage, j’ai assisté à un conseil municipal. À l’intérieur, il y a des membres de l’agro-industrie, de la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles). Je n’ai jamais fait un tournage aussi compliqué mais aussi exaltant. »

Plus on vous interdisait, plus cela vous galvanisait ?

« Tout à fait. C’était stressant parce qu’on nous supprimait des décors. Alors on en inventait d’autres. J’ai voulu tourner dans une porcherie industrielle. J’avais découpé toute la scène. J’avais rencontré le propriétaire qui m’avait autorisé à tourner. À 48 heures du tournage, il a reçu un coup de téléphone de la coopérative le menaçant. Quand tout le monde savait que je souhaitais tourner dans une porcherie industrielle, elles ont toutes fermé leurs portes. »

Comment avez-vous fait pour éviter l’opposition entre agriculteurs et écologistes ?

« Les agriculteurs sont des otages du système. Ils ne peuvent pas parler. Ils ne veulent pas parler. Ils souffrent du système parce qu’ils sont endettés. Ils sont incités à produire toujours plus et c’est terriblement mortifère. En France, deux agriculteurs se suicident par jour. Les sols et les eaux sont pollués. L’eau du robinet n’est plus potable. Mais le problème n’est pas local, il est national. C’est le ministère de l’agriculture et la FNSEA qui sont responsables et le lobby industriel qui est d’une puissance incroyable. Les élus locaux ne peuvent rien faire. C’est effrayant et suicidaire pour la région. »

Diriez-vous que c’est un film angoissant ?

« Le film n’est pas si effrayant. J’ai essayé de ne pas faire un film anxiogène mais un film combattant. Le combat est un remède à l’angoisse. C’est toujours tellement plus beau d’agir que de subir. »

Le cri d’alarme de la LPO, partenaire du film

 Le film montre très bien les problématiques des algues vertes. Il désigne un mauvais fonctionnement de la société , réagit Guy Bourlès, président de la LPO Loire-Atlantique. L’association a participé au scénario. L’agriculture biologique représente 10 % du modèle, l’agriculture industrielle 90 %.  Il faut inverser ces chiffres et lutter contre l’agriculture industrielle et ses excès. 

Selon le dernier rapport du CNRS (Centre national de la recherche scientifique), l’agriculture industrielle et les pesticides sont responsables de la disparition de 40 % des populations d’oiseaux en vingt ans.  Il faut revoir tout le système agricole. C’est un sacré challenge. C’est un travail de dix, quinze ou vingt ans , prévient Guy Bourlès.

Présente lors des avant-premières, la LPO était également au Parlement européen le 4 juillet 2023 pour alerter sur les menaces de l’agriculture intensive et présenter ses solutions.

Des algues vertes sur la côte…

Une catastrophe sanitaire

Chaque année, entre 75 et 115 sites sont touchés par les marées vertes et près de 50 communes ramassent des algues échouées. Un coût évalué à 500 000 € par an et par commune. En cause : l’agriculture intensive mise en place dans la région. Suite au remembrement des terres agricoles causé par l’élevage intensif, les nitrates, provenant des engrais et des lisiers animaux, se déversent dans les rivières et dans la mer, entraînant une prolifération des algues vertes. En décomposition, ces algues dégagent de l’hydrogène sulfuré, aussi appelé H2S, l’un des gaz les plus toxiques. Respiré, il peut entraîner de graves conséquences sur la santé.

Bande-annonce du film Les Algues Vertes

Source: https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/loire-atlantique/les-algues-vertes-un-scandale-sanitaire-et-un-film-qui-sort-ce-mercredi-12-juillet-2023-e21fd2fc-1588-11ee-ae57-25b1d1d54a03

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