Mal-être, suicide des agriculteurs : la Mutualité sociale agricole prend les devants (LT 10/04/2023 13h20)

Les crises comme la grippe aviaire sont des périodes fragilisantes pour les agriculteurs. La Mutualité sociale agricole d’Armorique porte une attention particulière aux exploitants, à travers son service social, la cellule de prévention du suicide ou encore le plan mal-être agricole. (Photo d’illustration Le Télégramme)

La MSA d’Armorique (Côtes-d’Armor et Finistère) va au-devant du mal-être et du suicide chez les agriculteurs. Dotée d’une référente mal-être, Fanny Kerbellec, elle se mobilise lors des crises comme la grippe aviaire, des périodes fragilisantes pour les exploitants.

Fanny Kerbellec, vous êtes référente prévention mal-être à la MSA d’Armorique depuis 2022. En quoi cela consiste ?

Je suis rattachée au service interventions sociales de la MSA d’Armorique. Le gouvernement a mis en place un plan mal-être agricole en 2020-2021 ; l’élément déclencheur a été le film d’Édouard Bergeon, « Au nom de la terre ». Je suis chargée de sa mise en œuvre dans les Côtes-d’Armor et le Finistère.

Je m’occupe aussi du suivi et du pilotage de la cellule de prévention du suicide, en place depuis 2011, au sein de notre MSA. C’est une cellule chargée de recontacter tous les assurés MSA qui, au cours d’un entretien avec un agent d’accueil, via la plateforme téléphonique ou un partenaire, ont eu des propos faisant allusion au passage à l’acte suicidaire. J’effectue la première évaluation. Et, si besoin, j’ai accès à deux médecins du travail, deux infirmiers du travail et une psychologue.

La cellule de prévention du suicide est chargée de recontacter tous les assurés MSA qui ont des propos faisant allusion au passage à l’acte suicidaire.

La cellule de prévention du suicide est-elle beaucoup sollicitée ?

En 2022, la cellule a reçu 172 signalements concernant des exploitants et des salariés.101 signalements touchaient uniquement des exploitants des deux départements et 96 signalements relevaient des Côtes-d’Armor. Le nombre de situations qui arrivent à la cellule est en légère baisse ; la prévention est un moyen efficace. En revanche, le nombre d’accompagnements effectués par notre service social est en hausse (4 106 en 2022) ; la démarche des travailleurs sociaux est davantage pro-active.

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Comment fonctionne concrètement cette cellule ?

Il s’agit d’une organisation interne à la MSA. Derrière la cellule, il y a une boîte e-mail qui est relevée tout au long de la journée ; les messages nous sont transmis par différents flux : un collègue de la MSA ou un partenaire, ou encore la plateforme téléphonique générale de la MSA.

S’il y a un risque suicidaire, on appelle la personne par téléphone pour effectuer une évaluation. On suit tout un protocole ; le plan que l’on va activer sera différent en fonction de la situation de la personne.

Il faut préciser que tous les exploitants qui sont en situation de mal-être ne sont pas en risque suicidaire. Le gros travail de notre service social est aussi de prévenir l’épuisement professionnel.

On essaye d’avoir une attention particulière pour les agriculteurs touchés par la grippe aviaire. On sait que ce sont des périodes de fragilité, plus importantes.

À la MSA d’Armorique, qu’avez-vous mis en place pour les exploitants touchés par la grippe aviaire ?

On essaye d’avoir une attention particulière. On sait que ce sont des périodes de fragilité plus importantes. On a un partenariat avec les services de l’État qui nous communiquent le nom des éleveurs dont l’élevage a été abattu. On les informe qu’il existe un service social à la MSA, qu’un accompagnement est possible par un travailleur social, par SMS, par téléphone ou courrier. Le service cotisation et recouvrement de la MSA a aussi des dispositifs particuliers en cas de grippe aviaire.

En 2022, dans le Finistère, on a récupéré la liste d’une centaine d’exploitants touchés ou se trouvant dans la zone de protection ou de surveillance. On les a rappelés un par un.

Depuis fin novembre 2022, du fait de la diffusion du virus, on ne peut pas intervenir de la même manière. Chaque territoire a récupéré le nom des exploitants dont l’élevage a été abattu. On a une démarche individuelle avec eux et on travaille actuellement à une approche collective pour ceux qui ont eu un impact psychologique ou financier.

Les numéros utiles
Quels sont les numéros de téléphone utiles pour les exploitants ou salariés agricoles en détresse et leurs proches ? La MSA d’Armorique conseille trois numéros, dont deux d’écoute.
– La première porte d’entrée pour les assurés, familles et proches, c’est la plateforme téléphonique de la MSA d’Armorique qui peut être jointe au 02 98 85 79 79 ; mais le service social n’est pas ouvert en continu.
– Le numéro national Agri’écoute, mis en place par la MSA, est dédié à l’écoute du monde agricole et rural. À l’autre bout du téléphone, ce sont des psychologues qui se relaient 24 heures/sur 24 et 7 jours 7 ; ils peuvent apporter une écoute en urgence ; ensuite, ils font le lien vers la MSA d’armorique avec l’accord de la personne si elle souhaite démarrer un accompagnement social. Tél. 09 69 39 29 19.
– Le numéro national de prévention du suicide, 3114, qui s’adresse à toute la population depuis 2021. La personne y trouve une écoute professionnelle, 24 h sur 24, 7 jours sur 7 et l’appel est gratuit. C’est l’hôpital de Brest qui gère cette plateforme pour notre région.

Mal-être et suicide chez les agriculteurs : qui veut devenir sentinelle ?
Il ne faut pas laisser un exploitant qui va mal… C’est la raison du déploiement du réseau Sentinelles, mis en place depuis 2013 sur le territoire de la MSA d’Armorique. Dans le cadre du plan mal-être agricole, les partenaires sont invités à le déployer au maximum.
Le réseau est constitué de personnes volontaires qui circulent dans le monde agricole (salariés d’organismes professionnels, anciens exploitants, élus) et qui ont pour rôle de repérer au plus vite des agriculteurs et salariés agricoles en situation de fragilité. L’objectif du plan mal-être est d’atteindre les 5 000 sentinelles d’ici fin 2023 en France. Les Côtes-d’Armor et le Finistère en comptent actuellement 130.
Des formations, financées principalement par l’Agence régionale de santé et la MSA d’Armorique, sont mises en œuvre chaque année. « Les sentinelles apprennent à avoir les bons réflexes et à trouver rapidement le bon interlocuteur », explique Fanny Kerbellec, référente mal-être à la MSA d’Armorique. Les prochaines sessions se tiendront les 19 et 23 juin et 27 et 28 novembre dans les Côtes-d’Armor ; les 22 et 23 juin et 27 et 28 novembre dans le Finistère.


Pour rejoindre le réseau Sentinelles, on peut contacter la plateforme téléphonique de la MSA d’Armorique au 02 98 85 79 79 ou envoyer un mail, animationelus.blf@armorique.msa.fr ou sur https://armorique.msa.fr/lfp/elu/echelon-local-armorique

Auteur : Lucile Argaud

Source : Mal-être, suicide des agriculteurs : la Mutualité sociale agricole prend les devants – Lannion – Le Télégramme (letelegramme.fr)

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