Olivier Mateu, secrétaire général de l’UD CGT 13 : “Je me fous qu’on dise que je suis Stalinien !” ( La Provence – 10/03/23 )

Olivier Mateu, secrétaire général de l'UD CGT 13.
Olivier Mateu, secrétaire général de l’UD CGT 13.PHOTO ALEXANDRE DIMOU

Il rigole. La FSM ? “Tout ce cinéma sur la Corée du Nord ! J’ai jamais vu un Coréen du Nord, sourit Olivier Mateu. Et si j’en voyais un, je discuterais avec lui de la situation sociale de son pays.” Pour le secrétaire général de l’UD CGT 13, il n’y a pas d’incompatibilité. La centrale adhère à la Confédération syndicale internationale (CSI), “où sont affiliées la quasi-totalité des organisations syndicales qui ont participé à tous les coups d’État fomentés par la CIA contre les gouvernements progressistes d’Amérique du Sud”. Et l’UD 13 à la Fédération syndicale mondiale (FSM), où siègent des syndicats proches de régimes totalitaires. Explications.

Georges Mavrikos, secrétaire général de la FSM, traite le gouvernement ukrainien de néonazi. Vous cautionnez ses propos ?

Georges Mavrikos pense ce qu’il dit et dit ce qu’il pense, et souvent il fait. Ça fait de lui un vrai dirigeant politique de haut niveau. Après, on est d’accord ou pas avec lui… Si je m’en tiens au traitement infligé aux syndicalistes dans le Donbass, en Crimée, les gouvernements ukrainiens n’en ont rien à faire du genre humain, de la liberté et de la démocratie. Est-ce que je considère que Volodomyr Zelensky est un néonazi ? Je n’irai pas jusque-là. Que ce soit une marionnette des États-Unis au travers de l’Otan, je l’affirme. Il a créé les conditions d’une guerre entre les États-Unis et la Russie, au détriment des travailleurs et des populations russes et ukrainiennes. Ce n’est pas un conflit entre ceux qui porteraient la démocratie et ceux qui tenteraient de l’éteindre. La réalité, c’est que les uns et les autres agissent pour des intérêts capitalistes. Et dans une guerre, il y a celui qui crée les conditions et celui qui les subit.

Les Russes ne sont donc pas selon vous les agresseurs ?

J’imagine que pour défendre les intérêts de la classe supérieure russe, Vladimir Poutine a pensé que la meilleure défense, c’était l’attaque. Si on stocke autour de votre jardin des bidons d’essence, en vous disant qu’à la première incartade, on allume le feu, à un moment, on prend ses dispositions. Mais je ne justifie pas ce que fait Poutine.

Dans une lettre ouverte, un militant explique qu’il quitte la CGT, parce que pour lui, elle doit toujours se tenir du côté des opprimés. En l’occurrence des Ukrainiens…

Ça fait partie du débat : certains pensent qu’il faut soutenir les Russes, d’autres les Ukrainiens. La réalité, c’est qu’il faut mettre fin à ce conflit car qui se gave ? C’est le lobby de l’armement et les capitalistes. La réalité, c’est que dans le port, il arrive encore du pétrole russe qui a simplement transité par l’Inde et qui nous est vendu comme neutre…

Vous n’avez pas peur que cette position discrédite l’action de la CGT dans le conflit social aujourd’hui ? Qu’on dise qu’elle est un allié de Poutine ?

La CGT a appelé à soutenir l’Ukraine, l’envoi d’armes, c’est ce qui fait aussi des désaccords avec l’UD 13. Pour nous, le rôle de la CGT, c’est de soutenir les travailleurs d’Ukraine et de Russie pour imposer à leurs dirigeants l’arrêt des combats. C’est une position que nous défendrons au congrès. On la défend pour d’autres. Si on demande d’envoyer des armes en Ukraine, pourquoi pas pour les Palestiniens ?

Finalement, ça vous apporte quoi cette adhésion à la FSM ?

Cela nous a permis d’avoir des contacts de travail sur de nombreux sujets, les télécoms, le portuaire. De la Grèce à Marseille, c’est souvent les mêmes patrons.

Vous incarnez un retour à la CGT des origines ? Celle des nationalisations ?

La part des richesses captées par les actionnaires est bien supérieure à celles d’il y a 30 ou 40 ans. J’assume d’être radical. Le seul moyen que nous avons aujourd’hui, c’est de reprendre les entreprises. Je préfère parler de collectivisation des moyens de production. Si ça n’a pas toujours bien marché, c’est qu’on a écarté les travailleurs.

Vous êtes un nostalgique de l’URSS ?

Non, je ne suis pas nostalgique même si je ne crache pas dessus. Il faudrait regarder les choses dans le détail pour savoir comment vivaient les Russes à chaque époque. 60 à 70 % regrettent le temps où on leur assurait une assiette pleine, l’accès à la culture, à l’éducation, à la santé. C’est sûr qu’à un moment, il y avait des problèmes de liberté. Regardez les Cubains aujourd’hui, ils expliquent que leur régime, ce n’est pas le socialisme, ils cheminent vers le socialisme. Il y a encore des étapes mais c’est la bonne voie, pas celle du capitalisme qui détruit la planète. Et je me fous royalement que l’on dise que je suis Stalinien. On me juge beaucoup, les patrons surtout, mais j’assume tout. Comment font-ils eux pour s’endormir le soir en sachant qu’ils ont laissé des familles dans la misère ?

Par Alexandra DUCAMP et Sophie MANELLI

Source : France – Monde | Olivier Mateu, secrétaire général de l’UD CGT 13 : “Je me fous qu’on dise que je suis Stalinien !” | La Provence

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *