Palestine : Fabien Roussel choisit le statu quo colonial (PRC-14/03/24)

Le secrétaire du PCF a été récemment interviewé par un journaliste d’Orient XXI sur sa position face à la guerre de Gaza. Dans cet entretien, le leader non charismatique de ce qui reste d’un parti révolutionnaire devenu social-démocrate rejoint dans les poubelles de l’Histoire ceux que Robespierre et Marat appelaient le marais, il ne cherche qu’à survivre politiquement, il n’est d’ailleurs pas certain qu’il s’y prenne bien.

Outre son ignorance crasse pour l’histoire et la situation actuelle en Palestine, Roussel se caractérise par l’enterrement systématique de tout ce qui faisait la position originale du PCF, dans les années 60, 70, 80, 90 sur le conflit colonial du Proche Orient. Il coche toutes les cases de l’intégration à l’idéologie dominante.

A l’aune de quelques-uns des critères que nous avons définis dans un texte précédent, à propos du hiatus entre la « gauche » en France et la cause palestinienne, nous nous proposons d’étudier ses propos et ses non-dits.

L’utilisation des mots du discours dominant 

La reprise des mensonges de la propagande israélienne

« Tout le monde ne qualifie pas les actes du 7 octobre d’attaques terroristes et je le regrette. » ; dans sa première phrase, Roussel ne caractérise pas le concept de terroriste, fait comme si sa pertinence était évidente pour tout le monde, bref il se plie au discours dominant et ne l’interroge pas (On ne lui demande même pas de le contester). Il dit, plus loin, à propos des résistants vietnamiens ou algériens : « Ils n’ont pas organisé des viols, ils n’ont pas délibérément tué des enfants, ils n’ont pas froidement assassiné des civils désarmés par centaines. » (sous-entendu, contrairement au Hamas), ce qui revient à prendre sans discussion la propagande israélienne, connue comme une des plus menteuses du monde, comme vérité absolue. 

Roussel semble à mille lieues de percevoir cette nature profondément menteuse de l’État d’Israël. Et pourtant, c’est une des clefs du problème. Sans ses deux mensonges originels : « Un peuple sans terre pour une terre sans peuple » et celui de l’existence d’un peuple juif, l’idée que les ashkénazes seraient des descendants des Hébreux exilés après 79 dans une soi-disant diaspora dont tous les historiens honnêtes, y compris israéliens comme Schlomo Sand, savent que c’est une invention destinée à tisser le continuum religieux, l’État d’Israël n’existerait pas, car il n’aurait pas pu faire affluer les colons. Si on ajoute le troisième mensonge, suite du premier « Le peuple palestinien n’existe pas », formulé en 1969 par la première ministre de « gauche » Golda Meir, on comprend qu’Israël ne peut s’arrêter de mentir, il n’y survivrait pas.

Libération nationale : mythes et réalités

L’un des maîtres mots du discours dominant de la « gauche » est de distinguer la libération nationale, le droit à la résistance du soi-disant « terrorisme ». Là encore, Roussel est bien dans le moule. Voici ce qu’il répond au journaliste lui demandant : « Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et à résister se discute-t-il ? Aucune guerre de libération n’a été exempte de l’utilisation d’actions terroristes si l’on définit celles-ci comme des attaques contre les civils. Cela a été notamment vrai en Algérie, au Vietnam… » : « Je ne suis pas d’accord. […] Le parti communiste français (PCF) a défendu et soutenu le FLN et s’est battu pour la décolonisation de l’Algérie et son indépendance. Les rares fois où il y a eu des civils délibérément tués, nous nous en sommes désolidarisés. Que ce soit en Algérie, que ce soit au Vietnam, des peuples colonisés ont fait le choix de recourir à la lutte armée pour s’en prendre à une armée mais pas aux civils. ».

Il faut d’abord revenir sur les contre-vérités manifestes portées par cet extrait. Le PCF n’a soutenu que tardivement le mouvement de libération nationale en Algérie, ce qui peut d’ailleurs s’expliquer, le FLN, contrairement au Viet Minh, n’était pas marxiste ni représentant du mouvement ouvrier et les communistes se sont souvent méfiés, à juste titre, d’un mouvement de libération nationale dirigé par la bourgeoisie nationale et non par le prolétariat. Le PCF s’est donc longtemps contenté du mot d’ordre de « Paix en Algérie » et s’est même fourvoyé en votant les pleins pouvoirs en 1956 au gouvernement de Front Républicain de Guy Mollet, l’homme de la SFIO (ancêtre du parti socialiste) qui avait promis la paix en Algérie et amplifia la guerre, envoyant notamment les paras « nettoyer » Alger. Le PCF ne se rallia à l’indépendance et au soutien au FLN qu’en 1960, sous la pression des « porteurs de valises », qui étaient fort nombreux parmi ses cadres intermédiaires et surtout sous l’influence du Parti Communiste Algérien (PCA), lequel, ne condamna absolument pas l’insurrection du 8 6novembre 1954 et décida, dès juin 1955 d’y participer. Par ailleurs, Roussel verse dans l’anachronique dans cette période où il est de bon ton de condamner ceci ou cela. A l’époque, le PCF a vertement critiqué la « bataille d’Alger » des paras et, à notre connaissance, n’a pas commenté les méthodes du FLN.

Quand à l’idée de combattants de libération purs, ne s’en prenant pas à des civils, c’est de la fantasmagorie. Lors de l’offensive du Têt, en 1968, l’armée nord-vietnamienne et le FNL (Front national de libération ou Viet Công, le mouvement de libération nationale marxiste du Sud-Vietnam) ont attaqué de nombreuses villes et occasionné des morts civiles. A noter que le principal résultat de cette offensive, qui fut un semi-échec, fut de choquer les États-uniens, tenus dans la croyance que les Nord-Vietnamiens étaient incapables d’un tel assaut, et affecta profondément l’administration de Lyndon Johnson dont de nombreuses personnalités se positionnèrent contre cette guerre, ce qui en altéra décisivement le cours. C’est à mettre en parallèle avec l’attaque des combattants palestiniens le 7 octobre 2023, puisque nous savons que l’un des buts cherchés était le même : surprendre, choquer, pour activer les réactions anti-occupation. Il se trouve que les réactions de la population israélienne ont été totalement contraires à celle des citoyens états-uniens à la fin des années 60. C’est à mettre sur le compte de l’idéologie colonialiste. Comme disait Marx « Un peuple qui en opprime un autre ne peut être libre. ». En Algérie, les femmes du FLN transportaient des bombes dans des couffins, bombes qui tuèrent aussi des civils.

Et si l’on interrogeait le concept de terrorisme ? 

A propos des couffins, Larbi Ben M’Hidi, dirigeant du FLN à Alger, arrêté le 15 février 1957, déclara à ses tortionnaires, à propos des attentats : « Donneznous vos chars et vos avions, et nous vous donnerons nos couffins ». Cela va à l’encontre de la suite de la réponse de Roussel : « Quand j’entends, parfois, que le terrorisme c’est l’arme du pauvre, je me soulève contre cette idée. Je ne la partage pas du tout. ». La violence est souvent nécessaire pour les révolutionnaires et les combattants de la libération nationale ; à l‘encontre de Roussel, Frantz Fanon, qui, contrairement à ce dernier, était marxiste, avait dit : « « Pour le colonisé, la vie ne peut surgir que du cadavre en décomposition du colon ». Et il serait bon que Roussel se souvienne ou apprenne que les FTP-MOI du groupe Manouchian déposaient des bombes dans des cinémas fréquentés par des soldats allemands, mais pas seulement…

Roussel a beau dire, dans un éclair de lucidité : « je ne suis pas dupe de l’usage du mot terrorisme, et je sais aussi que les États-Unis sont les premiers à en abuser. Ils l’ont posé sur le front de Nelson Mandela quand il était en prison, mais ensuite ils sont allés pleurer sur sa tombe. Ils l’ont posé sur le keffieh de Yasser Arafat, puis ils l’ont accueilli à la Maison-Blanche. Aujourd’hui ils font de Cuba un pays terroriste », il en reste là, non sans rappeler que « Je connais la charge politique de ce mot. Mais pour nous communistes, qui sommes le parti de la Résistance, nous ne confondrons jamais le combat pour la libération et l’indépendance d’un peuple et des actes de barbarie qui s’en prennent délibérément à des civils. ». Comme aurait pu dire Lénine, « Un pas en avant, trois pas en arrière ». Roussel semble obsédé par l’idée de ne pas aller trop loin, dès qu’il le pense, il rectifie en donnant des gages au discours dominant. Et pourtant, il lui aurait suffi d’ajouter, après le premier extrait, que « terrorisme » est un concept non retenu par le droit bourgeois international et que c’est celui qu’ont toujours utilisé les occupants et les colonisateurs pour désigner les résistants armés !

Le rapport au colonialisme

La diabolisation du Hamas

Nous reviendrons prochainement sur l’analyse de ce qu’est le Hamas et de ses rapports avec la Confrérie des Frères Musulmans. En attendant, Roussel enfourche le cheval de l’idéologie dominante de la troisième voie (ni Hamas, ni Netanyahu), qui est en réalité un moyen de justifier une position pro-sioniste. Voici ce qu’il répond lorsque le journaliste demande : « Peut-on interdire un mouvement qui représente près de la moitié des Palestiniens ? » : « Ma conviction est que le gouvernement d’extrême-droite de Netanyahu ou le Hamas, quel que soit leur poids dans leurs opinions respectives, ne permettront pas de trouver une solution politique à ce conflit, car tous deux sont opposés à la coexistence pacifique des deux peuples au sein de deux États. ». Outre le fait qu’il reprend le discours des torts partagés, il faut noter ce passage balayant le poids du gouvernement sioniste et du Hamas dans leurs « opinions » respectives. L’utilisation du terme « opinion » n’est pas neutre, surtout quand la question évoque le fait de « représenter » les Palestiniens. Si « opinion » fait plus référence à un sondage, ce qui minore l’importance tant du Hamas que de Netanyahu ; il est pourtant impossible, factuellement, de nier que le Hamas porte la parole de nombreux palestiniens comme Netanyahu celle de nombreux israéliens sionistes. Quel sens attribuer à cette mise à l’écart du poids politique du Hamas comme du Likoud ? Il ne s’agit pas seulement de les renvoyer dos à dos. Il s’agit d’abord d’une position néocolonialiste qui dénie aux Palestiniens le droit de choisir qui les défend, qui porte leur discours de résistance. Nous l’avons déjà écrit, c’est, quelque part, au nom d’un soi-disant universalisme des Lumières que certains se permettent de décider à la place des Palestiniens, ce qui est bien ou mal pour eux ; la petite bourgeoisie est très à l’aise dans ce discours, et Roussel ne fait pas exception. D’un autre côté, nier l’influence des idées ultra-réactionnaires de Netanyahu, c’est occulter l’influence du sionisme chez les Israéliens. Le sionisme est une théorie de la colonisation et, très majoritairement, la population juive de l’État sioniste approuve le fait colonial, déshumanise les Palestiniens quand elle ne les exclut pas de l’équation (à preuve la tenue d’un festival de musique à quelques encablures de la prison à ciel ouvert).

La philosophie des torts partagés

Cette conception qui écarte le Hamas de la liste des combattants a d’abord ceci d’irréel qu’elle ne tient pas compte de la réalité des combattants. Après cinq mois et plus de massacre à Gaza, Roussel devrait enfin savoir que, dès l’attaque du 7 octobre, la Résistance palestinienne qui a attaqué, s’est défendue et se défend encore ne se réduit pas au seul Hamas. Nous rappelons que cinq organisations dont deux marxistes (FPLP et FDLP), ont participé à l’attaque. Dans sa volonté de décider que le Hamas a autant de responsabilité que les dirigeants sionistes, Roussel cache, qu’il le veuille ou non, que la résistance est plurielle et que tout un mouvement en vue de l’unifier est en cours. Pas plus que le PCA ne pouvait résister sans s’allier au FLN, pas plus que le Parti Communiste Libanais ne peut résister sans s’allier au Hezbollah et aux Nassériens, les organisations palestiniennes marxistes ne peuvent résister sans s’allier au Hamas.

Avec son raisonnement totalement coupé du réel sur le Hamas comme ennemi à abattre, Roussel ne peut en venir qu’à des conclusions erronées comme : « Ce que subit le peuple palestinien à Gaza et dans les territoires occupés est une blessure pour l’humanité, aussi atroce que les crimes commis le 7 octobre. » ; Roussel considère donc qu’il y a égalité entre l’État colonisateur et le peuple colonisé. Ce faisant, il ignore totalement la nature coloniale du conflit.

La nature du conflit et la réalité d’Israël

Ce sont parfois les non-dits, plus que les paroles et les écrits, qui permettent de caractériser au mieux une pensée. Or, en 17 réponses à autant de questions, pas une seule fois, Roussel n’utilise les concepts de colonisation, colonialisme ou État colonial. Comment peut-il alors comprendre la réalité du conflit ? Son histoire et sa nature profonde ? C’est impossible, fort probablement parce que les références marxistes lui manquent.

Plus globalement, il ignore totalement ce qu’est le réel dans l’État sioniste. Interrogé sur la question d’un État d’apartheid, il en accepte le terme, mais curieusement, le limite à la Cisjordanie, sans évoquer Gaza : « En Cisjordanie c’est très concret. Il y a deux catégories de résidents là-bas : des colons qui ont tous les droits, et des colonisés qui n’en ont aucun. Les colonies sont des havres de paix, mais les villes palestiniennes juste à côté vivent l’enfer, les maisons y sont détruites, et les oliveraies y sont saccagées. Donc ne craignons pas d’utiliser ce mot d’apartheid pour caractériser ce qui se passe en Cisjordanie. » ; son propos est assez juste, mais quand on lit la suite, on est atterré par tant de méconnaissance du réel. La suite, donc, concerne l’État sioniste « stricto sensu », tel que reconnu par l’ONU. Et voilà ce qu’ajoute notre Candide : « Mais ce n’est pas le cas en Israël, où des députés communistes et arabes côtoient des élus d’extrême droite… » ; et comme le journaliste lui dit qu’ils sont menacés d’être expulsés de la Knesset, il rétorque : « Certes mais ils sont élus au Parlement, ce n’est pas une petite nuance. ». On retrouve bien là notre afficionado de la « république démocratique bourgeoise », comme disait Marx, qui pense que l’alpha et l’oméga de la démocratie c’est l’élection tous les 4 ou 5 ans de députés et que c’est au parlement, pas dans les luttes, que se décident les choses. Manifestement, il n’a pas retenu la leçon d’Engels dans « L’origine de la famille, de la propriété privée et de l’État » : « Et enfin, la classe possédante règne directement au moyen du suffrage universel. Tant que le prolé­tariat, ne sera pas encore assez mûr pour se libérer lui-même, il considérera dans sa majorité le régime social existant comme le seul possible et formera, politiquement parlant, la queue de la classe capitaliste, son aile gauche extrême. Mais, dans la mesure où il devient plus capable de s’émanciper lui-même, il se constitue en parti distinct, élit ses propres représentants et non ceux des capitalistes. Le suffrage universel est donc l’index qui permet de mesurer la maturité de la classe ouvrière. Il ne peut être rien de plus, il ne sera jamais rien de plus dans l’État actuel ; mais cela suffit. Le jour où le thermomètre du suffrage universel indiquera pour les travailleurs le point d’ébullition, ils sauront, aussi bien que les capitalistes, ce qu’il leur reste à faire. ». De la même manière, Roussel semble ignorer que ceux qu’on appelle les Arabes israéliens sont des citoyens de seconde zone, menacés à tout moment, s’ils sont hiérosolymitains, d’être chassés de leur maison à coups de bulldozers et de perdre de ce fait leur nationalité.

Enfin, on est encore plus atterré à la lecture de ce qui va suivre. Roussel évoque un réserviste israélien avec lequel il a discuté, probablement sur un plateau de télévision et dit ceci : « Je ne partage pas tout ce qu’il a dit mais il fait partie de ces centaines de milliers d’Israéliens qui ont manifesté pendant des semaines contre le gouvernement de Netanyahu… ». Comme le journaliste lui répond : « Il fait aussi partie de ces Israéliens qui tuent des Palestiniens à Gaza. », le secrétaire national du PCF a ces mots : « Je pense qu’il ne faut pas avoir une vision simpliste, en noir et blanc de ce qui se passe là-bas. Je me garderai de juger qui que soit. ». Voilà bien la preuve qu’en ignorant la nature coloniale de l’État sioniste, on en vient à excuser les massacreurs à son service, pour peu qu’ils aient manifesté contre « l’extrême droite ».

La chimérique solution à deux États              

Nous avons déjà évoqué un passage de la réponse de Roussel sur l’importance du Hamas pour les Palestiniens. Elle se termine par cette affirmation, évoquant à la fois l’organisation de résistance palestinienne et le gouvernement de l’État colonial : « car tous deux sont opposés à la coexistence pacifique des deux peuples au sein de deux États. ».

A aucun moment, dans son entretien, Roussel n’interroge cette « solution », ne cherche à savoir ni qui l’a « inventée », ni à quoi elle a servi, ni surtout ce qu’en pensent les Palestiniens. Il se contente, là encore, de reproduire sans le contester ou même l’interroger, le discours dominant. Par exemple, lui qui critique fort le Hamas, ne se demande jamais en quoi la mise en pratique des accords d’Oslo, donc de la solution à deux États, est responsable de la montée de son influence.

Une nouvelle fois, Roussel, à ce sujet fait preuve d’une ignorance (ou d’une déformation ?) des faits qui laisse pantois : « Ce sont les Nations unies qui ont imposé la création de l’État d’Israël. Ce qui a pu être fait en 1948 peut être fait aujourd’hui pour imposer un État palestinien aux côtés d’un État israélien dans les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale et la décolonisation de la Cisjordanie. ». Outre la naïveté que porte cette réflexion sur le rôle et les possibilités de l’ONU, la première phrase est tout simplement absolument fausse. En réalité, en 1948, Ben Gourion et ses amis se moquèrent de la résolution de l’ONU partageant la Palestine mandataire, proclamèrent unilatéralement (donc sans accord de l’ONU) l’indépendance d’Israël, conquirent le Neguev pour avoir un accès à la mer Rouge, partageant ainsi ce qui restait de Palestine en deux parties non contiguës et s’emparèrent de 76 % du territoire et non de 51, comme prévu par l’ONU.

Roussel poursuit en disant : « C’est parce qu’il manque une perspective politique que la guerre se poursuit. » ; il est d’ailleurs d’accord avec son ami réserviste sioniste sur ce sujet : « Le point de convergence avec ce réserviste israélien, c’est quand il dit : “tant qu’il n’y aura pas de perspectives politiques, la guerre continuera”. ». Mais quelle perspective autre que la fin de la colonisation et de l’État colonial pourrait exister ? Et qui bloque cette perspective politique ?

Un rapport bien naïf à l’impérialisme occidental

Bien entendu l’État colonial, en premier lieu, contre lequel il demande des sanctions, mais seulement jusqu’à la fin des bombardements à Gaza. Mais surtout les puissances impérialistes occidentales, dont, selon les mots de Georges Ibrahim Abdallah, l’entité sioniste est un « prolongement organique ». Or, quand il évoque les dirigeants français ou US ou de l’UE, Roussel se contente de regretter leurs décisions. Reçu à Saint-Denis par Macron fin août 2023, comme tous les chefs des partis politiques officiels, il l’interpelle sur la Palestine. Celui-ci balaie d’un revers de main la question, pour lui de second ordre et que même les pays arabes ne s’y intéressent plus (Comme quoi, le 7 octobre…). Il raconte cela au journaliste d’Orient XXI et conclut « Je regrette ce choix des pays arabes et des États-Unis, mais je regrette tout autant la position de la France, qui n’était pas obligée de s’aligner sur le sujet. ». Décidément, personne n’a jamais dit à Roussel que l’État sioniste était la pointe avancée des impérialistes occidentaux au Proche Orient. Avec la ligne atlantiste des dirigeants français depuis Sarkozy, bien sûr que la France est obligée de s’aligner.

Pour Roussel, la plainte de l’Afrique du Sud auprès de la Cour Internationale de Justice : « C’est peut-être le moyen de faire prendre conscience à de nombreux pays, notamment ceux de l’Union européenne et les États-Unis, qu’ils pourraient par leur silence être complices de crimes. ». Comme s’ils ne le savaient pas, comme si ce n’était pas le cadet de leurs soucis ! Comme si une instance internationale allait s’en prendre à l’impérialisme dominant et à ses seconds ?

Il est temps de conclure

Interrogé sur les faibles mobilisations en France, il évoque d’abord les interdictions de manifester de Darmanin « alors que nous aurions dû aller tous ensemble manifester, et exprimer autant notre soutien au peuple israélien meurtri dans sa chair le 7 octobre qu’au peuple palestinien qui subit une vengeance sauvage ». Au passage, un excellent résumé de ses positions : les torts sont partagés et les Palestiniens subissent une vengeance, pas une domination coloniale de substitution ! Et il poursuit par son explication des faits : « S’il n’y a pas eu ces mobilisations très larges, c’est aussi parce qu’il y a eu des débats à gauche sur la qualification du Hamas et des attentats du 7 octobre, mais aussi à propos de la perspective politique concrète, par exemple de reconnaître l’État de Palestine aux côtés de l’État d’Israël. Cela a semé le trouble sur le contenu de ces mobilisations et je le regrette. ».

Pour le Parti Révolutionnaire Communistes, l’explication est totalement inverse. C’est la position qu’il défend, à rebours de ce que disait le PCF, quand il était encore un tant soit peu communiste, qui explique cette difficulté à mobiliser. La troisième voie, l’impossible compromis entre colonisateur et colonisé, ça ne fonctionne pas et ça n’attire pas les foules. Quand-à la solution à deux États, toutes celles et tous ceux qui, contrairement à Roussel, s’intéressent au conflit colonial qui dure depuis 75 ans, ont bien compris que personne n’en voulait. C’est juste un colifichet qu’on agite pour faire semblant.

Fabien Roussel est le triste et pitoyable résultat de décennies d’adaptation du PCF au système capitaliste, de son abandon complet de la perspective révolutionnaire, de sa faiblesse idéologique et de ses exigences limitées au ripollinage du capitalisme. Cet entretien n’honore pas la mémoire de tous les militants passés du PCF qui ont combattu pour les droits des Palestiniens.

S‘agissant de la Palestine, rappelons que le PCF soutenait ce qui alors était la revendication de toutes les organisations palestiniennes et des pays socialistes : un État unique laïque, binational, dans les frontières de la Palestine mandataire. C’est la revendication actuelle, de nouveau, du Front Populaire de Libération de la Palestine. C’est également une solution qui apparaît comme la seule possible, même si c’est très difficile, pour le Parti Révolutionnaire Communistes. Comme le dit le slogan, un jour, la Palestine sera libre du fleuve à la mer, n’en déplaise à Fabien Roussel.

Source: https://www.sitecommunistes.org/index.php/france/politique/2697-palestine-fabien-roussel-choisit-le-statu-quo-colonial

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