PLFSS 2024 : DES BOMBES CONTRE LA SANTÉ ET LES ACQUIS SOCIAUX. (IO.fr – 23/10/23)

Par Nicole Bernard

La discussion sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) va commencer à l’Assemblée nationale, le 24 octobre, en séance plénière, avant le très probable et très rapide recours au 49.3 par le gouvernement. Tour d’horizon de quelques-uns de ses 40 articles.

Le projet gouvernemental, rappelons-le, n’a trouvé aucune voix favorable dans les caisses nationales d’assurance sociale, c’est dire qu’il n’a rien à voir avec la Sécurité sociale ! Qu’y a-t-il dans ce projet ? On peut regrouper ainsi les mesures en trois parties.

RÉDUIRE L’ACCÈS AUX SOINS.

Selon la Fédération nationale des personnels des organismes sociaux (CGT)1 : « Le PLFSS est annonciateur d’une situation catastrophique dans le domaine de la santé » . C’est simple : par rapport à 2023, les dépenses ne peuvent pas dépasser de plus de 3,2 % ! Autant dire que, vu l’augmentation des prix, vu l’augmentation, même totalement insuffisante des salaires, il y aura des lits en moins, des professionnels de santé en moins.

« Nous réanimons des bébés dans les couloirs », alerte la Société française de néonatologie. Cette situation ne peut qu’empirer. Puisque le système de soins ne peut plus soigner, il faut empêcher les malades d’y recourir, les empêcher de recourir à un médecin en autorisant les pharmaciens à délivrer des antibiotiques sans examiner le malade et sans bien entendu délivrer d’arrêt de travail ! C’est l’article 25. Il faut empêcher de prendre des antibiotiques en encourageant les pharmaciens à délivrer les antibiotiques à l’unité. C’est l’article 33.

L’accès aux urgences dentaires est régulé sur le modèle du tri opéré par le 15 pour les urgences médicales. C’est l’article 24.

Et pour poursuivre la fermeture des services hospitaliers, le PLFSS met en place une nouvelle tarification. A la funeste tarification à l’activité (qui privilégie le nombre d’actes au traitement de fond) s’ajouterait un financement individualisé « selon les objectifs de santé publique » c’est-à-dire les plans gouvernementaux. C’est l’article 23.

FAIRE PAYER LES MALADES

Le PLFSS arrive à l’Assemblée nationale alors que, depuis le 1 er octobre, le taux de remboursement des soins effectués par le dentiste est passé de 70 à 60 %. Le gouvernement attend un demi-milliard d’économies pour l’assurance maladie. Qui va payer ? Les malades ! Les assurances complémentaires à qui on a demandé en 2019 de couvrir une partie plus importante du reste à charge important en matière dentaire sont, comme il fallait s’y attendre, sommées, maintenant, de compenser le retrait de la Sécurité sociale et annoncent une hausse de 10 % des cotisations. L’augmentation des franchises, ce système totalement injuste qui fait payer les plus malades, est dans l’air. Sera-t-elle dans la loi de financement de la Sécurité sociale ? Passera-t-elle autrement ?

SATISFAIRE AUX DEMANDES DU CAPITAL FINANCIER

Si le gouvernement est bien décidé de faire payer les malades, il est aux petits soins pour le patronat et les intérêts capitalistes. Au point que, à l’article 4 du PLFSS, le gouvernement propose aux députés de faire cadeau de 120 millions aux labos et industries pharmaceutiques. Le PLFSS 2023 prévoyait que les sommes engrangées par les trusts pharmaceutiques au-delà de 24,6 milliards seraient taxées au profit de l’assurance maladie2. Figurez-vous que cela fait trop pour les labos ! Comme le gouvernement ne peut rien leur refuser, le seuil de déclenchement est augmenté à 24,9 milliards et donc… les rétrocessions vont diminuer.

L’article 11 poursuit les cadeaux en modifiant, pour 2024, la base de calcul de ces rétrocessions. Comme l’explique la fédération des organismes sociaux CGT : « Le gouvernement a décidé de modifier la clause de sauvegarde en la faisant reposer sur les montants remboursés par l’assurance maladie et non plus sur le chiffre d’affaires des laboratoires. C’est une économie évaluée à 35 % des bénéfices » .

Les articles 27 et 28 satisfont aux demandes du patronat sur l’indemnisation des arrêts de travail. Comme l’a expliqué IO n° 778, c’est maintenant le médecin de l’employeur3 qui va décider si l’arrêt de travail est ou non justifié. C’est-à-dire le médecin appointé par celui qui a intérêt à ce que le salarié reprenne son travail !

Enfin, pour qui douterait encore de l’inféodation totale du gouvernement aux demandes du patronat, il y a encore l’article 39. Cet article fait suite à l’accord national interprofessionnel sur les accidents de travail (cf. la critique dans IO n° 762)4. Un arrêt de la Cour de cassation est venu exiger que l’indemnisation d’un salarié à la suite d’un accident du travail causé par « la faute inexcusable de l’employeur » ne soit plus forfaitaire comme les autres rentes mais tienne compte des conséquences individuelles pour le salarié de ce que l’employeur a fait ou négligé de faire. Le patronat en tire-t-il comme conséquence qu’il faut éviter au maximum « la faute inexcusable » ? Non, il se demande qui va payer pour lui ! Et le gouvernement lui répond « qu’il (l’employeur) ne sera pas seul à payer » .

La Sécurité sociale est en danger de mort. Le capital financier ne se contente plus des dizaines de milliards d’exonérations. Ce sont tous les droits que confère la Sécurité sociale qui lui sont insupportables. Et le gouvernement est engagé dans cette guerre : la loi d’avril 2023 et le PLFSS 2024 sont des bombes contre la santé et les acquis sociaux.

Source : https://infos-ouvrieres.fr/2023/10/23/plfss-2024-des-bombes-contre-la-sante-et-les-acquis-sociaux/

URL de cet article : https://lherminerouge.fr/plfss-2024-des-bombes-contre-la-sante-et-les-acquis-sociaux-io-fr-23-10-23-2/

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