Par Soizic QUÉRO
Après la découverte de la profanation du mémorial de la Butte-Rouge, haut lieu de la Résistance, à Plœuc-L’Hermitage (Côtes-d’Armor), samedi 15 juillet 2023, l’émotion a submergé les acteurs locaux, qui pensent déjà à sa restauration.
Acte prémédité ou hasard du calendrier ? C’est ce que devra déterminer l’enquête des gendarmes des Côtes-d’Armor, ouverte pour déterminer qui sont le ou les auteurs des dégradations commises dans la nuit du 14 au 15 juillet 2023, selon nos informations, sur le site de la Butte-Rouge, haut lieu de la Résistance, à Plœuc-L’Hermitage.
Samedi matin, une kyrielle d’inscriptions antisémites et néonazies ont été découvertes au mémorial, situé au bord d’une route départementale, entre Loudéac et Saint-Brieuc. Durant la Seconde Guerre mondiale, les 14 et 30 juillet 1944, 55 martyrs, Résistants ou otages, originaires des communes environnantes (Plouguenast, Moncontour…), ont été exécutés par les nazis, dans la forêt de Lorge.
« Tout a été tagué »
Des croix gammées, des sigles « SS », des messages néonazis comme « Heil Hitler », des propos visant les Juifs… « Tout a été tagué, le monument, les panneaux d’information, les stèles, les portraits des Résistants qui jalonnent le chemin qui mène jusqu’au charnier … Comment peut-on s’en prendre aux visages de ces gens d’une vingtaine d’années, qui ont été torturés pour la liberté, notre liberté ?, s’étrangle le maire, Thibaut Guignard, sidéré et en colère. C’est la personnification de la Résistance. Ils ont été assassinés et ensevelis sous quelques centimètres de terre un peu plus loin. »
Sous le choc, Catherine Le Chêne, coprésidente de l’Association pour l’entretien du site de la Butte-Rouge, est « écœurée ». C’est un bénévole qui a constaté les dégradations, samedi matin.
Deux plaintes déposées
Dès samedi, les courageux bénévoles ont retiré les portraits dégradés et ont commencé à les nettoyer, avec l’accord de la Gendarmerie, qui a réalisé des prélèvements sur le site. « Nous n’avons aucune piste à ce stade », ont indiqué les enquêteurs. Ils ont enregistré deux plaintes de la part de la municipalité plœucoise et de l’association.
Sur les réseaux sociaux et dans la sphère politique, de l’échelon local au national, l’affaire a fait grand bruit ce week-end. « Plusieurs élus de toute la France et des Côtes-d’Armor m’ont témoigné leur soutien, se console Thibaut Guignard, qui a reçu un coup de téléphone de la Première ministre, Élisabeth Borne. Elle m’a affirmé que tout serait mis en œuvre pour identifier les responsables de ces dégradations et restaurer rapidement le mémorial. »
C’est aussi la teneur du message délivré publiquement, dimanche matin, par le préfet Stéphane Rouvé, lors de la cérémonie à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français et d’hommage aux « Justes » de France. La veille, il avait déjà fermement condamné « ces actes abjects ».
Une mémoire entretenue
Le maire de Saint-Brieuc, Hervé Guihard, a proposé à Thibaut Guignard, l’aide des agents municipaux, spécialisés dans le nettoyage des tags. La remise en état du site est une priorité et débutera dès ce lundi. « Les gens sont attachés aux 55 patriotes de la Butte-Rouge, assure Thibaut Guignard, déterminé à avancer. S’il le faut, on réimprimera les portraits. On connaît leurs visages, grâce au travail de l’association. On entretient d’ailleurs cette mémoire. »
Les premiers dépôts de fleurs sur le site, dimanche après-midi, le prouvent. Un temps de recueillement, dont les modalités restent à préciser, sera organisé en fin de semaine, au champ des martyrs.
Cette année 2023 marque le 79e anniversaire de la commémoration. Une cérémonie est organisée chaque 8 Mai sur le site, et un grand rassemblement départemental, en juillet, tous les cinq ans.
Le 80e anniversaire sera ainsi célébré en 2024. Après la profanation et l’émotion, la « reconstruction » est en marche, pour honorer la mémoire de ceux qui se sont battus et ont résisté pour la liberté.
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