Pontivy-La rage d’une enseignante bretonne mutée en région parisienne, loin de sa fille(LT.fr-11/09/22-

Christelle, enseignante qui habite dans le pays de Pontivy, est mutée en région parisienne, aux dépens de sa vie de famille.
Sa colère est infinie, tout comme son écœurement. Cette année encore, Christelle (*), enseignante de français dans le pays de Pontivy (56), a été nommée à 500 km de son domicile, « malgré des besoins dans le secteur ».

« L’enseignement était une vocation et petite, j’idéalisais ce métier. Maintenant, pour moi, c’est devenu un enfer ». Yeux cernés, mine renfrognée, Christelle n’a plus d’allant. Ni d’envie. Pour la troisième année consécutive, cette enseignante de lettres de 48 ans a été nommée dans l’académie de Versailles, soit à 500 kilomètres de son domicile où vivent son compagnon et sa fille de 11 ans. « Une injustice », tonne cette Bretonne qui, chaque semaine, s’enfile donc un trajet d’enfer pour se rendre à son travail, laissant en chemin des centaines d’euros et une empreinte carbone aberrante.

« C’est très difficile »

Christelle, fille d’ouvriers qui s’est toujours jurée de « ne pas vivre dans la difficulté », est une quadra bardée de diplômes qui, en tant que contractuelle, a enseigné dans plusieurs collèges et lycées bretons avant d’obtenir, en 2017, sa titularisation. Un tournant dans la carrière de cette Morbihannaise, mutée d’emblée dans l’académie de Versailles. « Étant donné la distance, j’ai préféré prendre une première disponibilité pour exercer dans une association avant d’être au chômage. Ensuite, j’ai enseigné dans une faculté du Morbihan », rembobine l’intéressée.

Au début, j’y allais en voiture mais écologiquement, est-ce raisonnable ?

Mais le CDD n’a pas été renouvelé. Et cette année, l’affectation en région parisienne est de nouveau tombée comme un couperet. « Au début, j’y allais en voiture mais écologiquement, est-ce raisonnable ? Je prends donc le train et pars de Pontivy le lundi matin, à 6 h, pour deux heures de bus vers la gare de Rennes où je cours littéralement pour être à l’heure. Arrivée à Massy (Essonne), je prends un autre bus pendant une heure afin d’arriver au lycée où l’on me demande d’être bienveillante et souriante. C’est très difficile ».

« Je me vois dépérir »

Surtout, cette mère de famille, dont le compagnon est enseignant dans le pays lorientais, ne voit plus beaucoup sa fille de 11 ans. « J’ai passé le concours pour gagner 500 € de plus et offrir de meilleures conditions à ma famille et finalement, c’est pire qu’avant. On me jette à 500 bornes de chez moi ! Je me vois dépérir, l’injustice me réveille chaque nuit. C’est une situation violente psychologiquement », tance, d’une voix dure, celle qui critique vertement le système de l’Éducation nationale.

Il ne me reste plus grand-chose à la fin du mois

« C’est une absurdité totale ! À cinq minutes de chez moi, dans un collège, des élèves ont besoin d’un prof de français. Et dans un lycée pas loin, à partir de novembre, une prof prendra une disponibilité et personne n’a encore été trouvé pour la remplacer. Il y a des besoins dans le secteur mais on m’envoie en région parisienne. Je dépense 500 € en trajet et 1 000 autres en logement sur place. À la fin du mois, il ne me reste plus grand-chose », rage Christelle, le cœur lassé. Et la passion du métier quelque peu altérée.

* Prénom d’emprunt

Pierre BERNARD

source: https://www.letelegramme.fr/morbihan/pontivy/la-rage-d-une-enseignante-bretonne-mutee-en-region-parisienne-loin-de-sa-fille-11-09-2022-13176806.php

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