Pour les anciens salariés d’Aviland, c’était l’heure des comptes aux Prud’hommes de Morlaix. ( LT.fr – 15/09/22 – 20h02 )

Seize des 27 ex-salariés sans-papiers d’Aviland ont fait le point avec leur avocat, Me Prévost, en fin de matinée ce jeudi, dans les bureaux de l’union locale de la CGT de Morlaix, avant l’audience de
Seize des 27 ex-salariés sans-papiers d’Aviland ont fait le point avec leur avocat, Me Prévost, en fin de matinée ce jeudi, dans les bureaux de l’union locale de la CGT de Morlaix, avant l’audience des Prud’hommes.

Plus d’1,6 million d’euros. C’est la somme réclamée, ce jeudi 15 septembre, aux Prud’hommes de Morlaix, par l’avocat des ex-travailleurs sans-papiers de la société Aviland. Le jugement sera rendu le 27 janvier 2023.

Ils demandent que « le calvaire » qu’ils ont subi soit reconnu. Vingt-sept anciens travailleurs sans-papiers d’Aviland, société landivisienne spécialisée dans le ramassage de volailles (liquidée le 18 mai 2021), ont déposé une plainte pour « traite d’être humains ». Le dossier est entre les mains du parquet de Brest.

En attendant, c’est l’aspect prud’homal de cette affaire qui était jugé ce jeudi 15 septembre, au tribunal de Morlaix. La salle, dans laquelle ont pris place une partie des plaignants, est pleine. Les dossiers volumineux. Face aux quatre juges, pas moins de sept avocats. Inédite et symbolique, l’audience s’annonce longue et technique.

« Une rencontre entre un système et des sans-papiers vulnérables »

Le premier à entrer en piste est Me Yann Prévost, avocat des demandeurs et président de l’Organisation internationale contre l‘esclavage moderne (OICEM). Il s’efforce, « sans entrer dans le pathos », de démontrer que ses clients ont été traités comme des moins que rien par Aviland. Menés en bateau. Menacés. Régulièrement insultés. Parfois frappés. Assurément sous payés. Pas équipés pour exercer leur activité. Et jamais déclarés en préfecture. « Ce dossier, c’est la rencontre entre un système et des sans-papiers vulnérables qui ne connaissent pas leurs droits. Un système qui oblige les salariés à être obéissants et permet de pratiquer des prix défiant toute concurrence », martèle-t-il.

Et de demander au tribunal de requalifier les contrats intermittents en CDI. De même que les licenciements, qui ne sont pas, selon lui, d’ordre économique. Il réclame aussi des rappels de salaires. Ainsi que des indemnités pour travail dissimulé et harcèlement moral. Le tout pour un total de plus d’1,60 M€.

Des indemnités « exorbitantes »

Des indemnités que Me Marie-Noëlle Colleu, représentant le centre de gestion et d’étude des AGS de Rennes, qui se substitue à Aviland pour régler les sommes dues aux salariés, trouve « exorbitantes ». Estimant que ce dossier est « emblématique des difficultés d’une filière », elle ne nie pas certains manquements. Mais assure que « la plupart des choses ont été faites dans les règles ». Notamment le paiement des cotisations à la MSA.

Surtout, elle pointe la coresponsabilité d’une douzaine d’éleveurs chez qui des sans-papiers ont travaillé. Selon elle, ils auraient dû s’assurer que leur co-contractant avait vérifié les titres de séjours. Et de demander un « jugement commun et opposable ». « Pas pour enfoncer les éleveurs mais pour leur rappeler leurs obligations ; pour que les choses changent. On parle d’argent public. »

M. Rolland, « grand absent des débats »

Inconcevable pour les six avocats desdits éleveurs. Car un jugement de ce type permettrait au CGEA de leur réclamer, dans une procédure future, une partie des sommes allouées. Or, les plaignants n’ont jamais mis en cause les éleveurs, qui ne comprennent pas ce qu’ils font là. S’ensuivent des demandes de nullité ou d’irrecevabilité.

« Bon courage pour juger tout ça », lâche une avocate. Qui ne s’explique pas pourquoi douze éleveurs seulement sont mis en cause, alors que 173 ont eu recours aux services d’Aviland, et donc à des sans-papiers. « On les jette dans la fosse », s’agace-t-elle, regrettant par ailleurs une audience déshumanisée. « On a parlé beaucoup de droit aujourd’hui. Mais peu des salariés et des éleveurs.» Et encore moins du « grand absent de ces débats : M. Rolland », l’ancien patron d’Aviland. Le jugement a été mis en délibéré au 27 janvier 2023.

Source : Pour les anciens salariés d’Aviland, c’était l’heure des comptes aux Prud’hommes de Morlaix – Morlaix – Le Télégramme (letelegramme.fr)

Auteur : Gwendal Hameury

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