Par Cyprien BOGANDA
Les salariés embauchés après le 1 er septembre par la RATP, les industries électriques et gazières, la Banque de France et les notaires seront désormais affiliés au régime général selon quatre décrets publiés au JO ce 30 juillet. Le gouvernement ose invoquer l’équité.
L’histoire retiendra donc que l’acte de décès des régimes spéciaux a été publié un dimanche matin, dans la torpeur de l’été. Un communiqué du gouvernement daté du 30 juillet nous apprend que quatre décrets parus au Journal officiel « concrétisent la fermeture au 1 er septembre 2023 des principaux régimes spéciaux », programmée par la dernière réforme des retraites.
Les conséquences sont immédiates : concrètement, cela signifie que tous les travailleurs embauchés à partir du 1 er septembre par la RATP, les industries électriques et gazières (IEG), la Banque de France et les notaires seront affiliés au régime général. En vertu de la « clause du grand-père », destinée à lézarder le front des agents mobilisés contre la réforme, les travailleurs embauchés avant le 1 er septembre pourront continuer à bénéficier de leur régime spécial.
Cependant, ils devront eux aussi reculer leur âge de départ à la retraite, à l’image de l’ensemble des salariés : « Ainsi, pour ces salariés, l’âge d’ouverture des droits à la retraite est progressivement relevé de deux ans et la durée d’assurance requise pour le taux plein voit sa montée en charge accélérée, comme au régime général, note le communiqué. Ces évolutions commenceront à prendre effet à partir du 1 er janvier 2025. »
Selon le ministre du Travail, l’enterrement des régimes spéciaux s’inscrit dans un nouveau « système de retraite plus équitable »
Dans le fond, rien de bien nouveau, donc, puisque toutes ces mesures avaient été annoncées lors de la bataille des retraites. En revanche, deux choses énervent les syndicats : le calendrier retenu – une publication des décrets en catimini, durant un week-end estival – et, surtout, les arguments du gouvernement visant à maquiller les reculs sociaux en progrès pour tous.
Fidèle à sa rhétorique libérale-orwellienne, le ministre du Travail cherche à nous convaincre que l’enterrement des régimes spéciaux s’inscrit dans un nouveau « système de retraite plus équitable », sans démontrer en quoi ce nivellement par le bas constituerait un avantage nouveau pour l’ensemble des travailleurs.
Par ailleurs, le communiqué recycle les éléments de langage concernant les « contreparties » accordées à l’ensemble des départs anticipés (travailleurs en situation de handicap, salariées avec enfants, etc.). « Ils osent encore présenter ces mesures comme des avancées, s’agace Denis Gravouil, secrétaire confédéral CGT. Les personnes en situation d’inaptitude pourront par exemple partir à la retraite à 62 ans : elles prendront donc leur retraite plus tôt que la majorité des travailleurs (obligés de patienter jusqu’à 64 ans – NDLR), mais plus tard qu’aujourd’hui ! »
Plus généralement, le responsable syndical observe le fossé séparant les promesses « d’apaisement » formulées par l’exécutif avant l’été et la réalité des actes. « Le 12 juillet, j’accompagnais Sophie Binet (secrétaire générale de la CGT – NDLR) à Matignon pour une reprise de contact, explique-t-il. On s’attendait alors à voir des preuves d’apaisement. Or, c’est tout le contraire qui s’est produit. Ces décrets en sont un exemple, mais il y en a d’autres : nous attendons toujours de recevoir la lettre de cadrage concernant l’avenir de l’assurance-chômage. »
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