Romain, chauffeur-livreur de 48 ans, mort au travail en 2021 (Histoire Populaire -7/10/23)

« Après la sidération et l’incompréhension, nous avons pris la décision de nous investir d’une façon ou d’une autre pour lutter contre ce fléau, pour lui. » Romain Goubard est décédé au travail le 26 avril 2021 lors d’une manœuvre avec une machine. Plus de deux ans après sa disparition, sa compagne Christelle David cherche encore à comprendre les circonstances de l’accident et souhaite s’engager pour que ce type de drame ne se réitère pas.Romain Goubard est né le 25 mai 1972 à la Flèche, en Sarthe. Il forme avec sa femme Christelle et ses deux enfants une famille unie. « C’était un père présent pour ses enfants et de façon générale quelqu’un d’investi » se remémore sa compagne. Représentant des parents d’élèves, Romain s’implique aussi dans la vie locale et associative. « Il lui arrivait par exemple de faire du bénévolat pour la commune lors de vide-greniers ou d’évènements dans le genre. Nous étions aussi tous les deux membres actifs d’une association de protection du patrimoine local ».« Il a travaillé toute sa vie »Mécanicien de formation, Romain a longtemps travaillé dans l’industrie automobile pour des entreprises comme Scania ou Valéo. En 2010, il est victime d’un licenciement économique suite au plan social de l’équipementier français sur le site de la Suze-sur-Sarthe. « Il a été ouvrier, magasinier-cariste, chef d’équipe chez Valéo. Mais il réclamait plus de responsabilité et on le lui refusait. Alors ce licenciement, il ne l’a finalement pas si mal vécu » se souvient Christelle. Ceci d’autant plus que Romain rebondit rapidement.Déjà titulaire d’un permis poids-lourd, il passe le permis 44 tonnes puis suit une formation de conducteur d’engins de chantier. Fort de cela, l’ouvrier reprend le métier de chauffeur-livreur qu’il avait déjà exercé étant plus jeune. Au quotidien, Romain transporte et livre des machines, des engins de chantier ou même des bungalows pour le compte de différentes entreprises. Il est finalement embauché en CDI par un petit transporteur local. « Malgré le licenciement et des périodes plus difficiles, il a été très peu au chômage. Il a travaillé toute sa vie ».Un dramatique accident du travailC’est sur les coups de 6h du matin que le 26 avril 2021, Romain quitte son domicile pour aller récupérer son camion. Une fois dans sa cabine, il prend la direction du Mans pour charger un chariot élévateur. L’engin doit ensuite être livré à Loué sur l’ancien site de l’entreprise Sica2M qui a fermé ses portes quelques mois plus tôt. Il est un peu plus de 8h30 lorsque le chauffeur arrive sur place et entame la manœuvre de déchargement de l’engin.Mais au moment de sortir du camion et d’engager sa descende, le fenwick glisse subitement. L’une des roues quitte alors la rampe emportant avec elle le reste de l’engin. Surpris par le basculement de la machine Romain saute instinctivement pour se mettre en sécurité. Mais il est trop tard et le chariot de plusieurs tonnes s’effondre sur lui. Malgré le massage cardiaque effectué par l’un des nombreux témoins de la scène, le sarthois meurt sur le coup.La responsabilité de l’entreprise engagée ?Le matériel mis à sa disposition ce jour-là était-il adapté à la tâche qui lui avait été confiée ? L’enquête devra le déterminer. Le dossier est aujourd’hui sur le bureau du procureur du Mans qui doit statuer sur les suites à donner à cet accident du travail mortel. De son côté, Christelle a porté plainte pour homicide involontaire dans le cadre du travail.« Nous voulons des réponses et que les personnes mis en cause prennent leurs responsabilités. Mais notre premier souhait, c’est avant tout que cela n’arrive plus et que ne soient pas oubliés ces travailleurs dont les vies sont sacrifiées au travail. C’est pour ça que nous avons contacté le Collectif familles : stop à la mort au travail. Après la sidération et l’incompréhension, nous avons pris la décision de nous investir d’une façon ou d’une autre pour lutter contre ce fléau, pour lui. ».