M. Louis Aliot, maire de Perpignan, a fait voter par son conseil municipal l’attribution du nom de Pierre Sergent à une place de la ville. Nous souhaitons rappeler qui était le personnage ainsi honoré.
Un homme honorable ?
Le jeudi 3 novembre, France-Inter a invité dans sa matinale le maire de Perpignan, M. Louis Aliot (Rassemblement National). Ce personnage public a notamment réaffirmé son intention d’honorer par le nom de Pierre Sergent une esplanade, dans la ville qu’il administre. Parmi ses titres M. Sergent reste notoire en tant que responsable « militaire » de l’Organisation de l’armée secrète (OAS) opérant en France, en 1961-1962.
Il nous faudrait les visages des quelque 71 morts frappés par les attentats commis sur le territoire français. Il nous faudrait des récits, des informations précises et actualisées sur les 400 blessés, sur ceux qui ne sont plus, et sur les survivants, à l’image de Delphine Renard, devenue aveugle des suites de l’explosion qui a ravagé son habitation le 7 février 1962.
Ces choses avaient commencé en mars 61, juste après la création de l’OAS, avec l’assassinat de Camille Blanc, maire d’Évian. Camille Blanc avait accepté d’accueillir les négociations franco-algériennes qui conduiront aux Accords d’Évian, mettant fin à la guerre d’Algérie.
Quelques mois après cet assassinat terroriste, M. Sergent prendra la direction des actes de l’OAS en France. À ce titre, il est directement responsable de l’attentat qui a mutilé Delphine Renard, alors âgée de 4 ans. Remettons-le en relief, dans la sinistre série, car ses auteurs étaient très jeunes, dont certains lycéens mineurs, fanatisés par les soins de M. Sergent et de son adjoint Kayanakis, passés experts en formation et utilisation de jeunes terroristes.
M. Aliot l’autre matin a fait comme si tout cela n’existait pas. Il dit vouloir illustrer M. Sergent en tant qu’homme politique ayant œuvré à Perpignan. Mais d’autre part, il a dit qu’il voulait « réconcilier les mémoires ». Cette formule a un seul sens possible : il s’agit d’une part de la mémoire des partisans de l’Algérie française, d’autre part de la mémoire des partisans de la paix et de l’indépendance algérienne. Cela implique nécessairement que le nom de P. Sergent, n’étant pas de la 2e catégorie, appartient à la 1e. Vouloir le célébrer, c’est commémorer un symbole du combat jusqu’au-boutiste pour l’Algérie française. M. Aliot, iriez-vous cacher votre option pro-OAS derrière un petit doigt perpignanais ?
Pour « réconcilier les mémoires », il vous reste à édifier en bonne place à Perpignan une stèle en l’honneur de Camille Blanc et des autres victimes des attentats OAS de 1961-1962.
Signalons pour finir que Sophie Mayoux, l’une des deux signataires du présent aide-mémoire, alors âgée de 13 ans, se trouvait seule un jour de février 1962 dans l’appartement familial du 14e arrondissement de Paris. Par chance elle se tenait à l’écart de la porte d’entrée. L’explosion de la bombe posée sur le palier par un émissaire de M. Sergent l’a tenue sidérée. Quand elle a pu ouvrir les yeux, elle a contemplé les dégâts.
Signataires : Patrick Mayoux, Sophie Mayoux
En souvenir de Jean-Jacques Mayoux, signataire du Manifeste des 121
Auteur : Sophie Mayoux