Le souffle coupé mais pas totalement surpris : à Ergué-Gabéric les 95 salariés de La Lampaulaise de salaisons encaissent l’annonce de Cooperl qui veut se séparer de cet outil breton et d’un second dans le Val-d’Oise. Cession de l’outil ou reclassement du personnel : 24 mois de sursis.
La direction de Cooperl assure vouloir accompagner tous les salariés de La Lampaulaise de salaisons avant fin 2025 date butoir de l’activité. (Le Télégramme/Olivier Scaglia)
« Je ne suis pas vraiment surpris, vu la baisse d’activité au fil des ans, commente Patrice, employé à la réception de la marchandise, 59 ans dont 25 dans la boutique. Vous savez, depuis la reprise de l’usine par Cooperl, en 2017, il n’y a pas eu de travail en plus ici. On a même perdu la ligne dédiée aux rôtis, partie à Loudéac… » « Ce qui est flagrant, c’est le manque d’investissements, estime Patrick 58 ans, opérateur sur une ligne de fabrication. On devait nous installer une nouvelle trancheuse voici plusieurs mois. Rien… »
Un peu plus de 13 h 15 ce vendredi 22 septembre, au pied de La Lampaulaise de salaisons, rue Galilée à Ergué-Gabéric. Silence et visages fermés. Fabrice Morvan, directeur de l’usine et son équipe viennent d’officiellement annoncer aux 95 salariés la mise en place d’un « plan de restructuration ». En clair, les fermetures programmées des sites d’Ergué-Gabéric et de Goussainville, dans le Val-d’Oise. Si l’annonce de la direction n’est pas tout à fait une découverte, le coup reste rude.
Cession ou reclassements
Cession, reclassement dans d’autres sites de la Cooperl voire dans des entreprises cornouaillaises : la direction de Cooperl annonce un délai de 24 mois pour trouver des solutions. Elle dit vouloir entrer dans le détail lors de négociations. Un nouveau point d’information des salariés est fixé au 12 octobre. « Ce que l’on veut maintenant, c’est être accompagnés », pose un autre salarié approchant la soixantaine et souhaitant rester discret.
On entendait des rumeurs, mais je ne pensais pas que ça se concrétiserait aussi vite
« On entendait des rumeurs, mais je ne pensais pas que ça se concrétiserait aussi vite », s’étonne tout de même Margaux, 25 ans, ingénieure agronome embauchée depuis un an et demi dans le service recherches et développement. « Jeune et mobile », et plutôt posée, elle ne cède pas à l’angoisse. Pas tout à fait le même refrain pour une partie non négligeable de l’effectif de La Lampaulaise, ainsi que le souligne Jean Simon Itarre, délégué CFDT.
Volume de production trop faible
« Il y a beaucoup d’anciens dans cette boîte, même si nous étions parvenus à remonter une équipe avec des jeunes, complète un responsable de production, dépité. Nous avions réussi à remonter en production après le rachat en 2017, c’était plutôt encourageant. Même si la facture énergétique restait très élevée : 140 000 €. »
Mais avec une activité centrée sur la transformation de poitrine de cochon (lardons, tranches fines et cuisson), les cinq lignes de production de La Lampaulaise de salaisons dégageaient une production de 5 000 t/an. Trop peu dans un modèle économique agro-industriel qui joue les volumes. « Nous avions élaboré un projet d’investissement de 3,30 M€ dans une nouvelle ligne en 2022 qui aurait pu monter la production à 9 000 t sur le site d’Ergué-Gabéric. Cet investissement n’a pas été réalisé », déplore Jean-Simon Itarre.
Onde de choc sur la filière
Augmentation du prix d’achat du kilo de porc, augmentation des coûts de production et baisse de la consommation seraient principalement à l’origine de la crise que traverse aujourd’hui Cooperl, selon Michel Le Bot. Le secrétaire général de la CFDT agri-agro Bretagne ajoute : « On peut s’attendre à ce qu’il y ait un sujet pour d’autres outils bretons d’abattage de porcs », comme ceux détenus par Bigard à Quimperlé et la Socopa à Châteauneuf-du-Faou, deux autres importants abattoirs bretons.
Auteur : Olivier Scaglia
URL de cet article : Vingt-quatre mois de sursis pour la Lampaulaise de salaisons à Ergué-Gabéric : 95 salariés sonnés (LT.fr 22/09/2023) – L’Hermine Rouge (lherminerouge.fr)