Exécutés, massacrés : les Finistériens ont payé un dramatique tribut en 1944 (LT.fr-24/10/24)

Historien chercheur au CNRS et président honoraire de l’association Le Maitron, Claude Pennetier mène avec son épouse, enseignante d’histoire, Annie, un travail remarquable de recensement des résistants et civils exécutés ou massacrés par l’occupant allemand. L’année 1944 a été particulièrement terrible dans le Finistère. (Photo Le Télégramme/Yann Le Gall)

Un colloque d’historiens, réunis ce jeudi et ce vendredi, à l’UBO, à Brest, redonne des visages aux Bretons victimes des occupants allemands. Claude Pennetier a trouvé une part importante de Finistériens.

Claude Pennetier, lors de ce colloque intitulé « Les victimes de 1944 en Bretagne », qui se tient ce jeudi et ce vendredi à la fac Segalen, à Brest, vous présentez le travail d’enquête que vous menez, avec votre épouse, pour recenser les victimes françaises de la répression allemande pendant la Seconde Guerre mondiale. Sur les 30 670 biographies de votre site (*), 3 053 sont des individus tués en Bretagne, dont 1 078 dans le Finistère. Pourquoi autant dans ce département ?

« 96 % des fusillés, exécutés ou massacrés dans le Finistère l’ont été en 1944. Notamment pendant la semaine sanglante de début août. Ce département, c’est la fin de la Terre. C’était aussi la fin des combats. Confrontée aux Résistants, à l’avancée des Alliés, aux opérations de reprise de Brest, l’armée allemande devient violente. On assiste à un déchaînement de la répression contre les populations. Il y a les massacres de Gouesnou (42 morts) ou de Landeleau, où cinq femmes sont jetées dans le brasier de leur ferme. La mortalité civile est énorme. Mais ce ne sont pas toujours des innocents ».

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Comment cela, pas que des innocents parmi les victimes ?

« Notre travail fait la part entre les résistants et les civils. Les premiers se sont engagés de façon lucide contre l’occupant. Parmi les seconds, il y a des victimes innocentes (femmes, enfants…) et d’autres ayant simplement eu un comportement qui n’a pas plu aux occupants. Nous avons retrouvé des cas de personnes exécutées parce qu’elles ont refusé la réquisition de leur charrette, ont été surprises dans un bal clandestin ou bien se sont interposées pour empêcher des Allemands de violer une femme. On peut considérer que ces victimes ont commis des actes patriotes.

On a aussi retrouvé l’identité d’étrangers passés par les armes, en Bretagne, parfois des déserteurs de l’armée allemande ».

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Votre enquête fait-elle apparaître des particularités propres au Finistère ?

« Le poids des marins, militaires comme pêcheurs, dans la Résistance y est très impressionnant. La part des agriculteurs tués parmi la population civile est également importante. Cela révèle un monde ancré sur le village, réagissant avec hostilité aux Allemands. Nous découvrons aussi qu’il y a beaucoup plus de victimes que nous l’imaginions (et nous en trouverons d’autres) et qu’il y a énormément de cérémonies de commémorations de massacres en Bretagne. Plus qu’ailleurs. On connaît des noms, pas forcément l’histoire qui les environne, mais tous les ans, il y a du monde ».

* Dictionnaire biographique des plus de 30 000 victimes recensées par l’historien chercheur du CNRS et sa femme, professeur d’histoire, consultable sur le Maitron des fusillés, guillotinés, exécutés, massacrés de 1940-44. (https://fusilles-40-44.maitron.fr/)

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Source: https://www.letelegramme.fr/finistere/brest-29200/executes-massacres-les-finisteriens-ont-paye-un-dramatique-tribut-en-1944-6689436.php

URL de cet article: https://lherminerouge.fr/executes-massacres-les-finisteriens-ont-paye-un-dramatique-tribut-en-1944-lt-fr-24-10-24/

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