Théodora-Danielle Rapha a perdu son mari, Raphaël, le 25 avril 2022, victime d’un accident du travail dans une usine de mareyage à Concarneau (Finistère). Pour dire non à cette fatalité et obtenir des réponses, elle organise une marche blanche, samedi 24 février 2024, à 14 h, au départ du quai d’Aiguillon, en face de la Ville-close.
Par Catherine GENTRIC.
Sa voix trahit l’émotion. Ses yeux disent la détresse. Depuis bientôt deux ans, Théodora-Danielle Rapha, une Concarnoise de 53 ans, se bat jour après jour pour savoir pourquoi son époux Raphaël est décédé à 53 ans dans un accident du travail, le 25 avril 2022, à 10 h 45, à la Socorex, une usine de mareyage de Concarneau (Finistère).
Ce jour funeste, Raphaël Rapha intervient pour surfacer une tôle métallique au-dessus du broyeur compacteur de caisses de polystyrène. « Pour une raison qui nous est inconnue, il a été retrouvé mort par un collègue dans la machine, explique Théodora-Danielle Rapha. D’après l’enquête menée conjointement par la police et l’Inspection du travail, mon époux se serait mis à cheval au-dessus de la machine pour avoir plus d’aisance. Sa jambe gauche aurait été happée par les grippes d’attrapage du tapis roulant qui l’aurait entraîné dans la machine, sectionnant mortellement l’artère fémorale. »
« Un homme expérimenté »
Des explications qui l’ont laissée « perplexe ». « On est allé jusqu’à me dire que c’était une faute d’inattention de mon mari. Mais il n’est plus là pour en témoigner. Comment une faute d’inattention peut-elle vous faire perdre la vie ? On va au travail. On doit pouvoir rentrer vivant chez soi le soir.
Sauveteur secouriste du travail et détenteur, entre autres, du certificat d’aptitude à la conduite en sécurité de nacelle (Caces), Raphaël Rapha était selon elle « un homme très carré et expérimenté dans son travail. Pourquoi se serait-il mis en danger connaissant la machine ? » dit-elle alors.
Elle rappelle que cette dernière était « à l’arrêt mais sous tension », et que Raphaël était « seul » lors de l’opération de maintenance. Deux éléments qui l’interrogent. Toutes les garanties de sécurité étaient-elles réunies pour cette opération de maintenance ?
Une information judiciaire ouverte
Des réponses qu’elle n’a toujours pas. La procédure judiciaire a été compliquée. Son dossier a été perdu. Ses appels pour savoir la vérité se sont heurtés à la complexité administrative et au « silence de l’entreprise ».
Sa longue bataillequi l’a menée « jusqu’au bout du rouleau » a pourtant pris un nouveau virage en décembre 2023. Le parquet de Quimper a « ouvert une information judiciaire pour homicide involontaire et infraction connexe en lien avec le droit du travail. Et nommé un juge d’instruction », explique Théodora-Danielle Rapha.
Une avancée qui lui permettra, avec ses avocats, « de récupérer l’entièreté de la procédure afin qu’on sache ce qui s’est passé ». En parallèle, elle a demandé à ses avocats de lancer « une procédure en reconnaissance de faute inexcusable de l’employeur ».
Mère de sept enfants, de 18 à 30 ans, « tous aussi secoués les uns les autres par la mort de leur papa », Théodora-Danielle Rapha, veut que l’entreprise « prenne ses responsabilités. Il y a eu un manquement de leur part, estime-t-elle. Aujourd’hui, il faut que ça bouge, pour que l’on puisse enfin faire notre deuil. »
Mais au-delà de son combat personnel, elle entend alerter sur ces accidents du travail qui tuent en moyenne « deux personnes par jour en France ». Samedi, elle organisera, pour « briser le silence », une marche blanche à Concarneau. Pour son époux Raphaël et pour tous ceux qui ont perdu la vie dans un accident du travail. Elle et ses proches seront entourés des membres du Collectif familles stop à la mort au travail. Matthieu Lépine, auteur de L’hécatombe silencieuse (Seuil), sera également présent.
Sollicité, Frédéric Toulliou, le directeur général de la Socorex, déclare pour sa part « n’avoir aucune information d’un point de vue judiciaire depuis l’enquête ». Cet accident « est un traumatisme pour l’entreprise et pour tout le monde », ajoute-t-il.
Samedi 24 février 2024, marche blanche, à 14 h, au départ du quai d’Aiguillon.
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