Les deux inspecteurs de l’environnement s’étaient sentis menacés par deux agriculteurs lors d’un contrôle sur une exploitation de Plabennec. Le tribunal a reconnu les violences, lundi 18 mars, et sanctionné dans un « souci d’apaisement ».
« J’ai eu peur d’aller contrôler la fosse à lisier, donc d’être jeté dedans. En 2004, en Dordogne, deux collègues sont décédés lors d’un contrôle comme ça, à coups de fusil. Quand vous avez des gens qui évoquent les suicides dans leur milieu, vous ne savez pas jusqu’où ils peuvent aller… Alors je suis parti de la maison en courant ».
L’émotion n’est visiblement pas éteinte, chez cet inspecteur de l’environnement de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), trois mois après une visite houleuse sur une exploitation agricole de Plabennec. Ce 12 décembre 2023, avec un collègue, il doit vérifier la bonne application de la directive nitrate. Mais après de premiers échanges courtois et un tour de l’exploitation, le ton change radicalement à l’heure de partager un café dans la cuisine.
À lire sur le sujet La justice vole dans les plumes d’un élevage XXL de volailles à Plounéventer
« Si vous sortez, c’est par la fenêtre »
Selon les deux agents, le gérant de l’exploitation et son frère auraient fermé la porte de la pièce, en interdisant la sortie pendant une demi-heure. « Si vous sortez, c’est par la fenêtre », aurait lâché l’un d’eux, au cours d’un échange tendu, ponctué d’allusions à un contrôle orienté par l’association environnementale L214, ou de menaces indirectes sur le thème « Si vous sortez, c’est par la fenêtre ».
Les deux agents sont parvenus à s’exfiltrer, après avoir assuré que le contrôle serait reporté. Une semaine plus tard, leur directeur départemental portait plainte, tandis que le préfet du Finistère signalait l’incident au procureur.
« Un contexte pas simple »
À la barre, ce lundi 18 mars 2024, le gérant évoque un « malentendu. Je n’étais pas informé qu’ils allaient visiter toute l’exploitation ». Son frère reconnaît, lui, « de l’énervement, vu la situation après la tempête Ciaran. On avait un devis pour 120 000 € de réparations… ».
Marie-Thérèse Miossec, conseil des deux agents, balaie l’argumentaire : « Ce contrôle ne tombait pas du ciel, ils ont été largement prévenus ». Et sermonne les deux agriculteurs sur leur attitude, le respect dû à l’autorité publique. Un argumentaire qui fait bondir l’avocat des agriculteurs, Ronan Appéré : « À peine avaient-ils le temps de faire l’inventaire des dégâts de la tempête qu’on vient les contrôler ! Y avait-il urgence à ne pas décaler de quelques semaines ? Ce dossier ne va pas rapprocher le monde agricole des contrôleurs ! ».
Dans la salle d’audience, plane aussi la crise que traverse l’agriculture. Ce « contexte pas simple », relevé par le ministère public, soucieux de ne « pas accabler financièrement » les prévenus. Le président Subts évoque d’ailleurs un « souci d’apaisement », au moment de prononcer les peines : des amendes de 1 000 €, dont 750 avec sursis pour le gérant et 500 pour son frère au casier judiciaire fourni. Tous deux devront verser 600 € à chacun des deux agents, au titre du préjudice subi.
URL de cet article: https://lherminerouge.fr/tribunal-de-brest-des-amendes-aux-agriculteurs-trop-agressifs-lors-du-controle-lt-fr-18-03-24/