
Les entreprises présentes au salon phare du secteur aérien promettent monts et merveilles pour décarboner leur activité, sans remettre en question la diminution du trafic aérien.
Par Lea DARNAY.
Au Salon du Bourget 2025, l’écologie est la reine de la fête. « Durabilité » et « décarbonation » s’affichent en lettres géantes sur la plupart des stands, les avions à hydrogène ou électriques exposés volent la vedette aux appareils propulsés aux énergies fossiles et un grand espace, le Paris Air Lab, promet de réinventer l’aviation de demain.
À l’affiche : réduction du bruit, carburants « durables », hydrogène par électrolyse, piles, copilote virtuel, jumeaux numériques et autres miracles d’innovation. Mais un mot manque : la sobriété, enjeu essentiel selon le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) pour faire face au réchauffement climatique.
La sobriété aux abonnés absents
Pourtant, 2024 a été une année record en termes de trafic aérien : près de 5 milliards de passagers, plus d’un milliard de tonnes de CO₂, soir l’équivalent des émissions annuelles du Japon, pourtant non négligeables. Airbus, dans son rapport sur les prévisions du marché mondial 2025-2044, annonce avec engouement plus de 3,6 % de croissance annuelle du trafic passagers, anticipant que 9 milliards d’entre eux prendront les airs d’ici vingt ans.
L’avionneur européen prévoit une flotte quasi doublée, à 49 210 avions. La multinationale a d’ailleurs ouvert le bal des commandes au Bourget en annonçant 105 ventes dès l’ouverture. Le géant de l’aéronautique n’a pas non plus pris comme mot d’ordre la sobriété, mais l’électrification.
Le greenwashing à l’honneur
La société met en avant l’ÉcoPulse, démonstrateur hybride-électrique développé avec Daher et Safran. Prometteur, certes, « mais il nous a prouvé que le 100 % électrique type A320 n’est pas pour demain », reconnaît un ingénieur du concept. Plus loin, la start-up Blue Spirit Aero expose le Dragonfly M24 et ses 12 moteurs électriques alimentés par des piles à combustible à hydrogène. Le premier vol d’essai est prévu dans les prochains mois et la certification pourrait intervenir d’ici 2028. Toutefois, l’aéronef de cinq places vise seulement le marché des écoles de formation de pilotes, et les taxis pour les très aisés.
TotalEnergies, lui, reste fidèle à ses habitudes. Alors que la multinationale s’est présentée devant le tribunal judiciaire de Paris le 5 juin pour répondre d’accusations de « pratiques commerciales trompeuses » concernant sa communication depuis son changement de nom, elle s’est pourtant payé un grand stand verdoyant au salon international de l’aviation. En devanture, la société présente le Velis Electro, le premier avion électrique au monde deux places, sorti en 2020.
Une apparente révolution à très faible autonomie, soixante minutes seulement, qui ne sert qu’à des cours de pilotage. De surcroît, le géant du pétrole a déployé des efforts de communication pour se présenter en leader des SAF (carburants dits « durables »), affichant fièrement ses objectifs de production d’un demi-million de tonnes d’ici 2038. De quoi tenter de faire oublier ses projets de « bombes climatiques », comme l’Eacop (Ouganda et Tanzanie), l’Artic LNG2 (Russie), le Vaca Muerta (Argentine) ou encore le Mozambique LNG.
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