Du 5 au 14 août, les 175 États parties se retrouvent autour de la table à Genève pour de nouvelles négociations autour de l’accord onusien sur la pollution plastique. Cycle de vie du plastique, produits chimiques… deux blocs s’affrontent.
Par Antoine PORTOLES
Moult fois recyclé, toujours pas adopté. Après deux ans de négociation et cinq sessions, dont la dernière, qui s’est déroulée à Busan (Corée du Sud) fin 2024, a échoué, le traité sur la pollution plastique revient sur la table pour un énième round du 5 au 14 août, à Genève (Suisse). Le rendez-vous de la dernière chance ? Le blocage de certains pays explique le fiasco de Busan et devrait persister à compter de ce mardi.
Face aux producteurs de pétrole, une coalition de la haute ambition
Sur les 175 États parties à l’accord onusien juridiquement contraignant, deux blocs s’affrontent. D’une part, ceux de la coalition de la haute ambition, qui réunit notamment l’Union européenne (dont la France), le Canada, mais aussi l’Australie, et qui milite pour un accord audacieux, ciblé sur l’ensemble du cycle de vie des plastiques. D’autre part, les « like-minded », ou pays producteurs de pétrole, tels que la Russie ou l’Arabie saoudite, allergiques à cette ambition et déterminés à confiner le périmètre à la seule gestion des déchets.
De nombreuses pierres d’achoppement demeurent, telles que la définition du cycle de vie du plastique ou l’utilisation de produits chimiques. Soit autant de points sur lesquels les « like-minded » jouent l’obstruction, au risque de laisser filer un accord nécessaire pour juguler le fléau des plastiques. Puisque le traité doit être adopté par consensus, ces États vont en profiter pour le tirer vers le bas, quitte à le rendre inopérant. D’autant qu’après la première mouture du texte de 2023, « on a perdu en ambition au fil du temps et des assauts de ces pays. On a déjà régressé et on se retrouve aujourd’hui avec un texte qui sauve les meubles », a constaté Muriel Papin, déléguée générale de l’association No Plastic In My Sea, en conférence de presse.
Les dommages causés à la santé ignorés des débats
À l’issue de la conférence des Nations unies sur l’océan de juin, 96 des 175 États parties avaient, dans l’appel de Nice, appelé à une réduction de la production mondiale et des additifs chimiques. Là se situe le cœur de la lutte, d’autant que les solutions fondées uniquement sur la gestion des déchets sont de plus en plus vilipendées. Un rapport publié par l’Environmental Justice Foundation (EJF), le 18 juillet, souligne les limites de cette doctrine en Thaïlande, huitième producteur mondial de plastique. Dans la province de Rayong, des résidus de produits chimiques ont été décelés dans le sol, la poussière, les œufs de poule ou encore dans le sang humain.
Les dommages causés à la santé, à la faune et à la flore sont ainsi devenus l’angle mort des négociations. « Nous avons besoin d’un changement audacieux et systémique, pas de fausses solutions », plaide Salisa Traipipitsiriwat, responsable des projets plastiques en Asie du Sud-Est, dans un communiqué de l’EJF.
Un nouvel état des lieux rappelle que “les plastiques provoquent des maladies et des décès de l’enfance à la vieillesse et sont responsables de pertes économiques liées à la santé dépassant 1 500 milliards de dollars (environ 1 300 milliards d’euros) par an”, selon un rapport publié ce lundi dans la revue médicale The Lancet.
Les dernières projections de l’OCDE attestent de l’urgence. L’utilisation de plastiques pourrait presque tripler au niveau global d’ici à 2060 par rapport aux niveaux de 2019, de même pour la production de déchets qui en découle. Les rejets dans l’environnement devraient ainsi s’élever à 44 millions de tonnes chaque année, tandis que les stocks de plastiques accumulés dans les rivières et les océans pourraient passer de 140 à 493 mégatonnes dans le même laps de temps. La quête de l’éradication du plastique sur la planète est loin d’être dans la poche.
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