Mort de Léon Landini, le dernier FTP-MOI (H.fr-21/09/25)

Léon Landini, ancien résistant FTP-MOI et cofondateur du Pôle de renaissance communiste en France, nous avait reçus chez lui, à Bagneux, fidèle à ses convictions et à la mémoire de la lutte. © Ayoub Benkerroum pour l’Humanité

Engagé dans le PCF clandestin et dans les FTP-MOI dès l’adolescence, le militant antifasciste est mort à 99 ans ce dimanche, au terme d’une vie marquée par sa participation à la lutte armée contre l’occupant, d’abord dans le Var, la Creuse, puis à Lyon pour la libération de la ville. Léon Landini n’avait jamais cessé les combats qui l’ont porté toute sa vie, avec son idéal communiste.

Par la rédaction de l’Humanité

Léon Landini est décédé le 21 septembre à l’âge de 99 ans. Il était le dernier des francs-tireurs et partisans de la main-d’œuvre immigrée (FTP-MOI) encore en vie. Au moment de la panthéonisation de Missak et Mélinée Manouchian, en 2024, la France avait redécouvert le visage de ce « vieux combattant », ainsi qu’il se qualifiait lui-même.

Alors qu’il avait attendu la dernière minute pour le convier à la cérémonie, le président de la République l’avait accueilli en personne. Léon Landini tenait fièrement le drapeau de son bataillon, Carmagnole et Liberté, et se battait pour avoir le droit de la conserver dans l’enceinte du Panthéon durant la cérémonie officielle. Sa détermination avait convaincu les services de l’Élysée que ce ne serait pas négociable. Avant de disparaître, Léon Landini bataillait encore pour que le maire de droite de Saint-Raphaël (Var), Frédéric Masquelier, réinstalle la plaque en hommage à la mémoire de son frère Roger.

« À la fin, il n’y avait plus que l’exécution »

Né en 1926 au Muy, près de Saint-Raphaël, Léon Landini était le fils d’immigrés italiens qui avaient fui le fascisme en 1921. « Nous avons été élevés au lait rouge », confiait-il à l’Humanité le 9 septembre dernier lorsqu’il nous a reçus pour un grand entretien. Son père, Aristide, avait lui-même été un élu communiste dans son village de Roccastrada en Toscane, où les fascistes de Mussolini massacrèrent 11 personnes.

Son frère Roger Landini, qui fut un dirigeant de la MOI en Rhône-Alpes, était âgé de douze ans de plus que lui. « On ne s’est pas levés un matin de 1940 en se disant : « Tiens, et si on devenait résistants ? ». La plupart des réfugiés italiens étaient déjà très politisés », témoignait-il auprès de l’Humanité. De fait, dès les années 1930, les Landini mènent des activités politiques qui les conduiront à entrer très tôt en résistance. Dans leur maison défilent des militants communistes (espagnols, allemands, polonais…) venus des pays où le fascisme s’installe. Palmiro Togliatti fera partie de ces camarades hébergés par la famille. Son frère, lui, se charge de convoyer des brigadistes en direction de l’Espagne.

Lorsque la guerre éclate en 1939, le père et le frère de Léon Landini s’engagent volontairement dans l’armée pour défendre la patrie qui les a accueillis. Après la débâcle de juin 1940, Léon Landini, âgé de 14 ans, prend déjà des initiatives. « Avec mon copain Jean Carrara, âgé de15 ans (qui sera massacré par les Italiens en 1944), nous n’avons rien trouvé de mieux que d’aller acheter des étiquettes sur lesquelles nous écrivions « Pétain tu as trahi la France » et « Moins de discours, plus de pain », narre-t-il à l’Humanité. Nous les collions sur les boîtes aux lettres, sans le dire à personne. Comme nous avons pensé que c’était insuffisant, nous en avons collé sur la gendarmerie… ça a fait un vrai scandale. Nous les avions achetées chez une commerçante dont le mari pétainiste avait rejoint la Milice. »

Mais c’est à partir d’octobre 1942 qu’il prend part à des opérations plus militaires. Il participe notamment au sabotage et au déraillement d’un train entre Saint-Raphaël et Cannes. Il rejoint les rangs du PCF clandestin. Quelques mois plus tard, en mars 1943, il prend part au dynamitage de la mine de Bauxite de Brignoles (Var), qui fonctionnait exclusivement pour l’armée allemande.

Lorsque les Allemands prennent le contrôle de la région, occupée jusqu’ici par les Italiens, c’est un nouveau tournant pour Léon et pour son frère. Ce dernier est arrêté et torturé avec son père par l’Ovra, la Gestapo italienne, et, en cours de déportation, réussit à s’évader à Dijon. Léon Landini rejoint sa famille dans la Creuse, mais ne reste pas longtemps dans ses activités agricoles. Là-bas, il rejoint un maquis FTPF (Francs-tireurs et partisans français) et participe à nouveau à des opérations de sabotage et des déraillements. Son frère est ensuite envoyé à Lyon, où la Résistance cherche « des cadres et des bras ».

« Certaines heures, la peur compte double »

Début mai 1924, Léon Landini part donc rejoindre son frère Roger, averti des risques. La répression exercée dans la ville est féroce. « Ici, ce n’est pas le maquis », le prévient-on. « L’espérance de vie est de trois mois ! Si tu ne veux pas rester, tu peux partir. » Léon Landini reste. Il participe à nouveau à des déraillements, mais aussi à des attaques contre l’armée allemande. Il n’en livre pas un récit romantique. « Nous avions peur vingt-six heures sur vingt-quatre parce que, certaines heures, la peur compte double. » Et il se dit encore marqué par les soldats allemands qu’il a dû abattre en mission. « Quand on nous disait « demain patrouille », on ne mangeait pas », témoigne-t-il.

Le 25 juillet 1944, tout bascule pour Léon Landini. Il tombe dans une nasse, est arrêté, torturé par des miliciens puis par Klaus Barbie. « Ça a été l’horreur : à coups de pied ils m’ont cassé le nez, écrasé les testicules, défoncé la boîte crânienne, se souvient-il. J’ai pas dit un mot. » Le 24 août, il s’évade de la prison de Montluc, profitant de la confusion créée par l’insurrection de Villeurbanne, et retrouve ses camarades qui le croyaient mort.

Après la Libération, Léon Landini a poursuivi ses combats autrement. Contre la guerre d’Algérie, le colonialisme, l’impérialisme… en désaccord avec les orientations du PCF dans les années 1990, il avait cofondé le Pôle de renaissance communiste en France (PRCF). À quelques mois de célébrer son centenaire, le « vieux combattant » s’est éteint, refermant avec lui l’histoire des FTP-MOI. L’Humanité présente ses condoléances à sa famille et à ses proches.

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Source: https://www.humanite.fr/carnet/2e-guerre-mondiale/mort-de-leon-landini-apres-une-vie-de-resistance

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