Au procès du RN, Guillaume L’Huillier s’embourbe et Marine Le Pen s’agace (H.fr-16/10/24)

Marine Le Pen, le 16 octobre 2024, arrive au tribunal judiciaire de Paris, pour son troisième jour d’audience.
© Raphael Lafargue/ABACAPRESS

Le tribunal judiciaire de Paris a auditionné Marine Le Pen ce mercredi 16 octobre pour la troisième journée consécutive. En cause cette fois-ci, son contrat avec Guillaume L’Huillier, soupçonné d’avoir travaillé auprès de Jean-Marie Le Pen alors qu’il était censé occuper le poste d’assistant parlementaire de Marine Le Pen au Parlement européen.

Par Emma MEULENYSER

Il est presque inaudible. Le ton bas, nonchalant, Guillaume L’Huillier a la voix si légère que la greffière lui demande à plusieurs reprises de répéter. Parfois, la présidente reprend ses propos, comme pour le traduire, par bonté pour les oreilles du fond de la salle.

Engoncé dans un blazer bleu marine, l’ancien assistant parlementaire de Marine Le Pen s’accoude nonchalamment au pupitre. L’air faussement à l’aise, il agite sa main gauche lorsqu’il répond aux questions de la présidente. Personne n’est dupe.

Ce mercredi 16 octobre, au troisième jour d’audition de Marine Le Pen, accusée de détournements de fonds dans l’affaire des assistants parlementaires fictifs, il est au centre des débats. Après le cas de Catherine Griset, Micheline Bruna et Thierry Légier la veille, c’est au tour du contrat la reliant à Guillaume L’Huillier d’être examiné.

« Jamais eu la fonction de directeur de cabinet, seulement le titre »

Déclaré comme l’assistant parlementaire de Marine Le Pen entre le 1er novembre 2009 et le 30 juin 2011, il serait devenu, à la même période, le directeur de cabinet de Jean-Marie Le Pen, à l’époque président du Front National. Du moins, c’est ce qu’il a longtemps maintenu dans ses différentes déclarations.

Lorsque la présidente mentionne ce poste et ses déclarations sur le sujet, il l’interrompt soudainement : « Là c’est de ma faute. Le titre de directeur de cabinet, c’était uniquement à partir de 2011 ». Il assure également, mais là pas de surprise, qu’il n’a « jamais eu la fonction de directeur de cabinet, seulement le titre ».

Ce qui aurait pour mérite de lui donner plus de légitimité qu’un simple assistant parlementaire auprès de la presse, selon ses dires. La presse : seul domaine qu’il gérait auprès de Jean-Marie Le Pen à raison « d’une heure ou deux par jour ». 

Patrick Maisonneuve, avocat des parties civiles, se lève pour poser ses questions. Le malaise démarre son ascension. Il revient d’abord sur ce changement de date à propos de son « titre » de directeur de cabinet auprès de Jean-Marie Le Pen.

« La protection des frontières, c’est tout le temps ! »

« Est-ce que vous ne décidez pas de décaler à 2011, quand Jean-Marie Le Pen devient président d’honneur, pour vous donner plus de crédibilité à occuper ce “titre” de directeur de cabinet ? ».Il serait effectivement moins « grave » pour Guillaume L’Huillier d’avoir occupé cette fonction à partir de 2011, lorsque Jean-Marie Le Pen n’est plus que président d’honneur du Front National et n’avait donc plus les rênes du parti.

L’avocat embraye sur ses fonctions d’assistant parlementaire au Parlement européen, demandant au prévenu sur quels thèmes il a particulièrement travaillé. Guillaume L’Huillier est incapable de répondre.

Il mentionne vaguement des sujets « récurrents », gesticule sur le pupitre, s’impatiente. « La protection des frontières, c’est tout le temps ! », lance-t-il. Rien de bien convainquant. Lorsque Patrick Maisonneuve lui demande comment se passent ses journées, il se tourne immédiatement vers son avocat, provoquant l’hilarité de la salle. 

Pire encore, Guillaume L’Huillier n’a pas été en mesure de fournir une seule preuve de ses activités au Parlement européen. « Vous n’avez rien conservé ? », s’étonne le procureur. « Non, je ne garde rien ! », promet-il. « Pourtant, quand on a fait une perquisition chez vous, on a trouvé deux ordinateurs, des clés USB, un disque dur rangé dans la cave : donc on voit bien que vous êtes en capacité de garder des éléments ». « Pour ce qui nous intéresse on a rien ! Aucun élément utile à l’enquête ! », renchérit Patrick Maisonneuve. C’est ballot.

Marine Le Pen hausse le ton

Marine Le Pen quitte le banc où elle était assise depuis le début de la séance. Elle rejoint son avocat, une pile de dossiers dans les bras. Elle les épluche à mesure que Guillaume L’Huillier s’embourbe dans ses explications, comme pour s’y réfugier. Peut-être aimerait-elle s’y enfoncer. Son visage est livide.

Après une suspension de séance, c’est à son tour de passer à la barre pour s’expliquer sur son contrat avec Guillaume L’Huillier. Plutôt calme ces deux derniers jours, Marine Le Pen emploie d’emblée un ton particulièrement offensif. Envers la présidente comme la partie civile.

« Sur la base de quel indice grave et concordant suis-je obligée de répondre ?, s’époumone-t-elle. On me demande à moi d’apporter la preuve ? Il me semblait que c’était à l’accusation de fournir plus de preuves. Je viens vous dire nos sentiments : il y a zéro preuves. On est soumis à une présomption de culpabilité ! ». Il faudra mieux faire pour prouver son innocence.  

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Source: https://www.humanite.fr/politique/front-national/au-proces-du-rn-guillaume-lhuillier-sembourbe-et-marine-le-pen-sagace

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