« Ça pose de gros problèmes de précarité » : devenir kiné est 35 fois plus cher à Rennes qu’à Brest (OF.fr-24.06.25)

Manifestation des étudiants bretons en kinésithérapie, en décembre 2024 à Rennes. À gauche avec le porte-voix, Raphaël Rault, étudiant en troisième année à Brest et représentant du Kiné Université Brest étudiants (Kube). | OUEST-FRANCE

« Devenir kinésithérapeute en Bretagne : des conditions de vie et d’études alarmantes pour les étudiants » : c’est le titre d’une étude qui pointe les différences de conditions entre les deux Instituts de formation en masso-kinésithérapie (IFMK) à Brest (public, 850 € les quatre ans) et Rennes (privé, 30 000 € les quatre ans). Décryptage.

Par Pierre FONTANIER.

Devenir kinésithérapeute en Bretagne : des conditions de vie et d’études alarmantes pour les étudiants : c’est le titre évocateur d’une étude menée pendant quatre mois, de novembre 2024 à février 2025. En Bretagne, 142 des 513 étudiants ont répondu au questionnaire, soit près d’un sur 3 (1 750 étudiants en France, soit un étudiant sur six).

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Public à Brest, privé à Rennes

Pour devenir kiné, il faut faire cinq ans d’études : un an de faculté de médecine, puis quatre ans d’école de kiné. En Bretagne, il existe deux instituts de formation en masso-kinésithérapie (IFMK) : un à Rennes (Ille-et-Vilaine, 349 étudiants), l’autre à Brest (Finistère, 164 étudiants). Le hic, c’est que Brest est un établissement public qui coûte 850 € pour les quatre ans, alors que celui de Rennes est privé et revient à… 30 000 €.

Du changement en 2023

« Depuis septembre 2023, les étudiants brestois ne sont plus soumis aux 24 000 € de frais de scolarité illégaux qui leur étaient auparavant imposés pour les quatre ans de formation, met en avant l’étude. En application de la décision du Conseil d’État, obtenue suite au recours déposé par la Fédération nationale des étudiants en kinésithérapie (Fnek), leurs frais de scolarité ont été alignés sur les frais universitaires. Mais près de la moitié actuellement en formation à Brest subissent encore les conséquences financières de ces frais injustifiés, ce qui impacte les statistiques présentées dans cette étude. »

« C’est indécent ! »

« Ce sont les étudiants rennais qui sont pénalisés, commente Raphaël Rault, étudiant en troisième année à Brest et représentant du Kiné Université Brest étudiants (Kube). Ce sont les mêmes études qui conduisent au même diplôme mais coûtent plus de 35 fois plus cher à Rennes, c’est indécent ! » Cela pose « de gros problèmes de précarité » : 28 % des étudiants kinés bretons ont déjà songé à arrêter leurs études et un sur deux a vu sa situation financière se dégrader depuis le début de ses études. 37 % considèrent que leur santé mentale s’est dégradée depuis le début de leur formation, un sur deux a déjà souffert de troubles mentaux et 85 % ressentent de l’anxiété scolaire. Enfin, 60 % se considèrent exclus du système universitaire, ce qui est le cas comme le montre l’enquête.

« Un système à bout de souffle »

Un étudiant sur quatre ne mange pas à sa faim. 29 % des boursiers n’ont pas accès au repas à 1 € alors que ce droit fondamental est inscrit dans la loi. Les étudiants kinés paient en moyenne 76 € de transport chaque mois pour se rendre à l’institut et demandent la gratuité des transports en commun. Moins de 3 % vivent en cité universitaire car « c’est la Région qui gère et pas le Crous ». Le montant moyen emprunté par un étudiant en kiné est de 31 394 € dans le privé contre 20 608 dans le public. 81 % doivent travailler à côté ce qui a un impact négatif sur la santé pour 28 % et sur leur qualité de formation et d’apprentissage pour 36 %.

« Aucune volonté politique de changement »

« Ce système est à bout de souffle. Nous demandons l’uniformisation des frais de formation à Rennes avec ceux de Brest et notre intégration à l’université. En juillet 2023, on nous l’a promis avant le 1er janvier 2025. Mais il n’y a aucune volonté politique de changement, d’où notre mobilisation en décembre 2024. Sans parler de notre obligation, à partir de 2027, d’exercer les deux premières années en zone sous-dotée ou en structure », poursuit Raphaël Rault. Depuis 2004, c’est la Région qui gère le financement des formations sanitaires et sociales : « Les frais de scolarité dépendent donc des régions », pointe l’étude. Indemnisés entre 1 et 1,9 € de l’heure pendant leurs stages, les étudiants kinés demandent 4,15 €/h.

« J’ai la tête sous l’eau »

« Je suis stressée en permanence et la précarité n’améliore rien. Je risque la rupture de mon contrat de fidélisation […]. Je n’ai pas les moyens de financer ma formation », explique Pauline*, étudiante en 2e année à l’IFMK de Rennes. « J’ai la tête sous l’eau, je vois la suite du semestre qui arrive et j’ai peur de ne pas y arriver tant il y a de travail. Avoir au-dessus de la tête une dette de plus en plus grande au fil du temps n’aide pas », ajoute Arthur*, en 4e année à Brest. « Cette situation engendre beaucoup de fatigue, de stress et des questionnements constants sur mes choix », rebondit Nolan*, en 1re année à Rennes. Les futurs kinés attendent plus de justice et d’égalité.

*Prénoms d’emprunt

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Source: https://www.ouest-france.fr/bretagne/ca-pose-de-gros-problemes-de-precarite-devenir-kine-est-35-fois-plus-cher-a-rennes-qua-brest-fa872df4-500f-11f0-8c5f-0f80ab190e33

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