Comment le machiavélique Netanyahou tente de saboter le cessez-le-feu à Gaza. (l’Humanité – 19/10/25)

Le point de passage de Rafah, ici le 19 octobre 2025. Israël a soumis sa réouverture à la remise de tous les otages décédés. Ce point sera fermé « jusqu’à nouvel ordre », a fait savoir Tel-Aviv.
© AHMED SAYED / Anadolu via AFP

Le premier ministre israélien refuse d’ouvrir le passage de Rafah entre l’Égypte et le territoire palestinien. Il multiplie les incidents en espérant une reprise de la guerre. Sûr d’avoir retrouvé sa popularité, il a également annoncé sa candidature pour les élections de 2026.

Par Pierre Barbancey

Benyamin Netanyahou est un homme politique machiavélique. Son attitude pourrait de nouveau entraîner la région dans le chaos. Toutes ses déclarations des derniers jours, de même que les ordres donnés à ses troupes toujours stationnées dans la bande de Gaza, n’indiquent qu’une chose : sa volonté de briser le cessez-le-feu et de reprendre, d’une manière ou d’une autre, la guerre.

Israël a soumis la réouverture du point de passage de Rafah, entre la bande de Gaza et l’Égypte, crucial pour l’entrée de l’aide humanitaire dans le territoire palestinien dévasté, à la remise de tous les otages décédés. Ce point sera fermé « jusqu’à nouvel ordre », a fait savoir Tel-Aviv. Cette fermeture « bloque l’entrée des équipements spécialisés nécessaires » pour rechercher les corps sous les décombres et « entraînera des retards importants dans la récupération et la remise des dépouilles », a réagi le Hamas.

Aucune contrainte sur Israël

Comme beaucoup le craignaient lors de l’annonce du plan Trump, le 29 septembre, aucune contrainte n’est exercée sur Israël. Netanyahou est connu pour ne pas respecter sa parole. On l’a constaté après le cessez-le-feu du mois de janvier avec le Hamas négocié – déjà – par l’Égypte, le Qatar et les États-Unis, violé quelques semaines après sous de fallacieux prétextes.

Cette fois, la première des trois phases du plan Trump étant en train de s’achever, Israël veut empêcher ou tout du moins retarder les discussions sur la deuxième, créer des conditions de blocage. C’est le cas notamment du désarmement du Hamas d’un côté et du désengagement israélien de l’autre.

Pour ce dernier, le flou est total. Netanyahou a déjà indiqué qu’il n’était pas question pour son armée de se retirer totalement. Il entend maintenir ses troupes dans une zone tampon, à l’intérieur du territoire palestinien, qui serait ainsi totalement ceinturé, y compris sur sa frontière avec l’Égypte, une route appelée « corridor Philadelphie ».

Le mouvement palestinien, lui, s’est dit prêt à ne pas participer à un quelconque exécutif pour diriger la bande de Gaza, mais refuse, en l’état, tout désarmement. Une éventualité qui, par ailleurs, n’est pas mentionnée dans le texte de cessez-le-feu signé le 9 octobre à Charm el-Cheikh (Égypte).

Interrogé la semaine dernière par l’agence Reuters, sur la question de savoir si son organisation allait rendre ses armes, Mohammed Nazzal, membre du bureau politique du Hamas, a expliqué : « Je ne peux pas répondre par oui ou par non. Franchement, cela dépend de la nature du projet. Le projet de désarmement dont vous parlez, qu’est-ce que cela signifie ? À qui les armes seront-elles remises ? »

L’armée israélienne a procédé à un premier retrait, minime, et a tracé une « ligne jaune » que les Palestiniens sont censés connaître et ne pas franchir. Vendredi, près de Rafah, les soldats ont pris pour cible un bus, tuant neuf personnes d’une même famille, dont des enfants, sous prétexte qu’un véhicule « suspect » était « en train de franchir la ligne jaune ». Un témoin et des médias israéliens ont fait état, dimanche, de deux frappes aériennes israéliennes sur le sud de la bande de Gaza. L’armée a expliqué que « le Hamas avait mené plusieurs attaques dans des zones sous contrôle israélien ».

L’arrêt des manifestations contre Netanyahou

Tel-Aviv est totalement soutenue par Washington. Le département d’État a indiqué samedi disposer d’« informations crédibles » selon lesquelles le Hamas préparait une attaque imminente contre des civils à Gaza. « Cette attaque planifiée contre des civils palestiniens constituerait une violation directe et grave de l’accord de cessez-le-feu et compromettrait les progrès significatifs réalisés grâce aux efforts de médiation. » Et de prévenir que, « si le Hamas réalise cette attaque, des mesures seront prises pour protéger la population de Gaza et préserver l’intégrité du cessez-le-feu ». Des affirmations démenties par le mouvement islamiste palestinien.

Pour Benyamin Netanyahou, la conjoncture ne pouvait être meilleure. Le retour des captifs israéliens scelle l’arrêt des manifestations contre lui. À la Knesset, Donald Trump a même demandé à la justice israélienne de cesser ses poursuites contre le premier ministre.

Invité sur le plateau de Channel 14, et à la question : « Envisagez-vous de vous présenter aux élections pour devenir premier ministre lors des prochaines élections ? », prévues en 2026, Benyamin Netanyahou a répondu par l’affirmative. À la question : « Gagnerez-vous si vous vous présentez », il a indiqué dans un large sourire : « Oui ». Autant dire que le pire reste à venir.

Source : https://www.humanite.fr/monde/benyamin-netanyahou/cessez-le-feu-a-gaza-comment-benyamin-netanyahou-multiplie-les-incidents-pour-reprendre-la-guerre

URL de cet article : https://lherminerouge.fr/comment-le-machiavelique-netanyahou-tente-de-saboter-le-cessez-le-feu-a-gaza-lhumanite-19-10-25/

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