
À la pointe bretonne comme ailleurs, la situation politique du pays est source d’insécurité, voire d’angoisse pour les chefs d’entreprises. Le climat d’incertitude actuel plombe l’activité économique et freine à la fois les investissements et l’embauche. Deux patrons brestois en témoignent.
Par Nicolas OLIVIER.
Le ton est grave et les mots forts.« Cette situation est traumatisante », indique d’emblée Béatrice Cochard. Co-dirigeante de Voltstage, une entreprise qui installe des systèmes d’alarme, de vidéo-protection et de domotique, elle s’inquiète de l’immobilisme dans lequel est empêtré le pays, après la démission du Premier ministre Sébastien Lecornu. « Rien ne bouge, on voudrait alléger nos charges pour payer plus nos salariés mais on ne nous écoute pas. Pas plus les patrons que les gens qui sont au Smic. Vivre avec un Smic aujourd’hui, ce n’est pas possible. On a un problème de fond, sauf que là-haut, ils sont à essayer de trouver des solutions mais qui ne sont plus du tout proches de notre réalité ! »
Morosité
L’entreprise basée à Guipavas et Ploudaniel (21 salariés) est pourtant en « plein développement » grâce à une forte demande sur son secteur, mais elle commence à mesurer les effets de cette crise politique. « On est inquiets puisque nos clients le sont. Ils vont faire des investissements mais beaucoup plus légers. Tout le monde est angoissé. Là, on vient de faire le salon de l’habitat, c’était pas un bon salon. C’était morose ! Il y a plein de marchés qui ne se font pas. C’est cette morosité qui s’installe qui fait qu’on réfléchit à deux fois avant de faire un investissement, on réfléchit avant d’embaucher. Autour de nous, il va y avoir de la casse, c’est évident », pronostique-t-elle.
Béatrice Cochard confirme être beaucoup plus prudente lorsqu’il s’agit d’embaucher. « On ne sait pas où on va donc forcément c’est un frein. On va plus partir sur des petits contrats, attendre de voir. Il faut qu’on soit rassurés. »

Si le constat est similaire, les conséquences du chaos politique sont déjà bien réelles chez Hippocampe, au port de commerce de Brest. Depuis près d’un an, la petite agence de communication, qui compte cinq salariés, subit de plein fouet les restrictions budgétaires décidées par ses clients, publics ou privés.« On observe un certain malaise, un mal-être, reconnaît Olivier Branellec, fondateur et dirigeant. Et comme on est un peu en bout de chaîne, on voit beaucoup de marchés disparaître parce que nos clients n’ont plus de moyens pour poursuivre les missions qui nous étaient confiées. »
Ce patron a été contraint de geler ses projets d’embauches, et il s’apprête même à transformer son entreprise en agence des transitions pour capter de nouveaux marchés plus porteurs. « Il faut faire preuve d’agilité dans cette période de fortes turbulences et d’incertitude », assène-t-il. Olivier Branellec avoue avoir du mal à comprendre l’absence totale de culture du compromis dans la classe politique : « Si on agissait de la sorte dans nos entreprises, elles seraient vite dans le mur. On est obligé de faire des compromis. »
Le spectre de la dissolution inquiète fortement
Alors que les Français sont suspendus à la décision du président de la République, la perspective d’une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale inquiète particulièrement les dirigeants de PME. « Ce ne serait pas une bonne chose du tout », estime Béatrice Cochard, qui juge que la campagne électorale paralyserait à nouveau le pays pendant plusieurs mois. Olivier Branellec redoute plus que tout une éventuelle victoire du Rassemblement national :« C’est plus qu’inquiétant, ce que nous voyons aux États-Unis est juste effrayant. Si ça nous arrive à nous, au-delà même de la vision de dirigeant d’entreprise, en tant que citoyen… Pour moi, c’est terrifiant. »
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