Impérialisme US : de l’hégémonie vers l’effondrement ! Par Diagne Fodé Roland. (11/06/25)

Après le « black live matter » contre les crimes racistes, la révolte populaire reprend aux USA. Les images du réveil de la lutte des classes des prolétaires déferlent sur les réseaux sociaux dans un silence assourdissant des médias officiels des bourgeoisies impérialistes et néocoloniales à travers le monde.

C’est la Californie qui s’embrase contre la chasse aux sans papiers en général et en particulier sud-américains. Trump y envoie l’armée, « garde nationale et forces d’interventions extérieures », pour mâter le soulèvement populaire. La présidente du Mexique Claudia Sheinbaum a demandé que les sans papiers soient traités « avec dignité » parce que « Ce sont des hommes et des femmes honnêtes qui sont allés chercher une vie meilleure […]. Ce ne sont pas des criminels ».

Trump tout comme les politiciens bourgeois dans les États impérialistes d’Europe gèrent la crise de surproduction et de sur-accumulation du stade suprême du capitalisme en menant une politique intérieure raciste désignant les migrants, notamment sans papiers et les minorités nationales noire, hispanique et amérindienne comme les boucs émissaires des souffrances sociales et des déboires économiques de la société et en politique étrangère en menant des politiques de sanctions et de guerres contre les États souverainistes qui refusent la vassalisation.

De Bush, Clinton, Bush junior, Obama, Biden, l’impérialisme US a misé sur les guerres de l’Afghanistan, Irak, Yougoslavie, Libye, Syrie pour contrôler les sources de matières premières stratégiques, notamment le pétrole et le gaz, sur des guerres par proxis sionistes israéliens ou djihado-terroristes interposés comme dans le Sahel et des sanctions dictatoriales commerciales, financières, etc.

La mondialisation libérale militariste est la stratégie géopolitique pour préserver l’hégémonie séculaire de l’Occident impérialiste sous l’égide US.

Trump, candidat par effraction du parti Républicain, a battu ces « mondialistes libéraux » en vendant aux électeurs états-uniens le « retour du boulot au pays », la « fin de la paupérisation des classes moyennes », « l’immigration zéro » aux USA.

C’est donc la recherche de la préservation de son hégémonie mondiale qui a produit, selon la juste formule de Bertolt Brecht, en temps de crise la fascisation de la démocratie bourgeoise US illustrée par la figure du président commerçant Trump dont la démagogie socio-politique raciste promettant « America first » conduit avec violence au retour en arrière vers le suprémacisme white comme antidote racialiste au déclin inexorable de l’impérialisme yankee.

L’oppression nationale : un des piliers de l’impérialisme US

Les contradictions internes qui minent le capitalisme impérialiste US sont les contradictions capital/travail et white suprémacisme/minorités noire, hispanique, amérindienne et migrante. La lutte de classe d’ensemble des travailleurs a été confinée systématiquement en luttes sectorielles anti-racistes légitimes mais ne s’élevant jamais à un niveau de convergence et d’unité suffisantes pour renverser l’État bourgeois impérialiste yankee.

Contre les illusions propagées sur l’élection de Obama, nous écrivons que « le capitalisme US s’est construit à la fois sur l’exploitation de classe et l’oppression raciale et nationale. C’est ce que notait fort justement déjà au XIXème siècle Karl Marx concernant l’Angleterre et les États-Unis: « L’Angleterre a maintenant une classe ouvrière scindée en deux camps ennemis: prolétaires anglais et prolétaires irlandais. L’ouvrier anglais ordinaire déteste l’ouvrier irlandais comme un concurrent qui abaisse son niveau de vie. Il se sent à son égard membre d’une nation dominatrice, devient, de ce fait, un instrument de ses aristocrates et capitalistes contre l’Irlande et consolide ainsi leur pouvoir sur lui-même. Des préjugés religieux, sociaux et nationaux le dressent contre l’ouvrier irlandais. Il se conduit envers lui à peu près comme les « Blancs pauvres » envers les Noirs dans les anciens États esclavagistes de l’Union américaine. L’Irlandais lui rend la pareille largement. Il voit en lui à la fois le complice et l’instrument aveugle de la domination anglaise en Irlande. Cet antagonisme est entretenu artificiellement et attisé par la presse, les sermons, les revues humoristiques, bref par tous les moyens dont disposent les classes au pouvoir. Cet antagonisme constitue le secret de l’impuissance de la classe ouvrière anglaise, en dépit de sa bonne organisation. C’est aussi le secret de la puissance persistante de la classe capitaliste, qui s’en rend parfaitement compte » (Marx à S. Meyer et A. Vogt-in Marx-Engels, Correspondances).

La division raciste de la société a été « le secret de l’impuissance » de la classe ouvrière états-unienne parce qu’elle a servi à recouvrir d’un voile épais et diviseur la lutte de classe des ouvriers contre leurs patrons. Et voilà que confronté à la plus grave crise économique et sociale depuis 1929, le système capitaliste états-unien fait appel à un représentant de l’élite bourgeoisie noire pour tenter d’éviter une crise politique majeure pouvant mettre en péril la dictature de classe de la grande oligarchie bourgeoise.

La IIIème Internationale Communiste a analysé, dès 1928, la dimension mondiale du pilier de l’oppression raciale et nationale organisée, édifiée par l’impérialisme : «La question noire aux États-Unis doit être traitée en relation avec les questions et les luttes des Noirs dans d’autres parties du monde. La race noire est une race opprimée partout. Qu’elle constitue une minorité (États-Unis, etc.), une majorité (Afrique du Sud) ou qu’elle habite un soi-disant État indépendant (Liberia, etc.), les Noirs sont opprimés par l’impérialisme. Ainsi, un intérêt commun est établi pour une lutte révolutionnaire de libération raciale et nationale contre la domination impérialiste des Noirs dans les diverses régions du monde» (Résolutions du CEIC et de la Commission Noire, 1928 et 1930).

Il est essentiel de comprendre l’importance pour le développement de la lutte de classe de ce que Karl Marx disait : «les travailleurs à la peau blanche ne peuvent s’émanciper là où les travailleurs à la peau noire sont marqués au fer rouge ». La marque au fer rouge imprégnée dans la peau des peuples noirs par le système impérialiste à travers le système bien développé d’oppression nationale et raciale les placent au bas de l’échelle sociale et nationale, affaiblit, divise et empêche la lutte commune de tout le prolétariat international. La lutte contre l’asservissement des travailleurs à la peau noire mine tout le système chauvin et raciste parce que si le racisme et le chauvinisme contre les Noirs sont vaincus alors toutes les prémisses du chauvinisme et du racisme sont minées pour tous les autres peuples opprimés et tout le système idéologique impérialiste séculaire du national-chauvinisme et du racisme s’effondre.

Si donc le choix d’Obama par le grand capital US obéit à un plan de sauvetage politique immédiat imposé par la crise du système capitaliste, objectivement à moyen et long terme, le second pilier sur lequel repose le capitalisme US – le racisme – prend un coup dont l’onde de choc stratégique va favoriser le rapprochement et l’unité des prolétaires états-uniens au delà de la ‘race’, de la couleur, de la religion et des origines ».

Dans cet article de novembre 2008 intitulé « UN NOIR ÉLU PRÉSIDENT DES USA : UNE NOUVELLE ÉTAPE DANS LA LUTTE POUR L’EGALITE DES DROITS ! », nous poursuivons : «Toutefois ces dernières années est en train d’émerger aux USA, en plus de la question noire, celle des Hispaniques. C’est ainsi qu’après le « choc des civilisations », dans lequel il prédisait, tout en le préconisant, un affrontement entre les civilisations chrétienne et musulmane, l’un des théoriciens de l’impérialisme US, Samuel P. Huntington, s’est mis à s’interroger sur « Qui sommes-nous ? Identité nationale et choc des cultures ». Selon Huntington le choc des civilisations existe aussi à l’intérieur même des États-Unis et menace l’identité états-unienne ramenée à trois éléments : « race blanche, langue anglophone, religion protestante ». L’émigration sud-américaine et sa fécondité de 3% contre 1,8% pour les « white » remettent en cause la dite « identité » : « L’immigration mexicaine, s’inquiète Huntington, mène actuellement à une reconquista démographique de territoires que les Américains avaient enlevés au Mexique par la force » (la guerre entre le Mexique et les États-Unis en 1846-1848). Tout comme la crainte séculaire de l’impérialisme états-unien d’un « Québec noir » pour les Noirs majoritaires dans la Black Belt, à travers Huntington, le capitalisme US craint maintenant la formation d’un « Québec hispanophone » dans le sud-ouest états-unien. Dix des douze villes importantes situées du côté états-unien de la frontière mexicaine, précise Huntington, sont hispaniques à plus de 75 % (six d’entre elles le sont à plus de 90 %). Mais le plus grave, déplore Huntington, c’est que les Mexicains ne veulent pas devenir Américains! La preuve : entre 66% et 85% d’entre eux insistent sur la nécessité pour leurs enfants de parler couramment l’espagnol qui de fait est aujourd’hui la seconde langue aux USA. Le droit à l’autodétermination de la nation en constitution Chicanos, au Nouveau Mexique notamment, a trouvé une expression politique avec la formule intégrationniste « nous sommes aussi l’Amérique » qui met l’accent sur l’égalité des droits, étape vers le droit à la séparation ».

Il faut espérer que le combat anti-raciste et antifasciste aux USA va faire converger les victimes noirs, hispaniques, amérindiennes, asiatiques et migrantes, étape vers la jonction avec les travailleurs whites. Rappelons que Malcom X et tous les révolutionnaires états-uniens comme les communistes Harry Haywood, Angela Davis ont tous œuvrés à partir de la lutte contre les discriminations ségrégationnistes pour l’unité combative de l’ensemble du prolétariat.

La crise politique conséquence de la crise économique

La contradiction inter-bourgeoise US entre Wall-Street et Silicon-Valley, entre bourgeois impérialiste cowboy de l’est et de l’ouest s’est soldée par l’élection de Trump. Mais Trump est en passe de perdre le bras de fer tarifaire et douanier qu’il a imposé au monde entier, en particulier à la Chine Populaire communiste. Le divorce politique entre Trump et Elon Musk est une manifestation de la crise politique qui perdure et continue à s’aggraver au fil de l’approfondissement de la crise systémique du stade suprême du capitalisme. Comme nous le citons dans notre article de novembre 2008, « Dans le Financial Times, le Pr Jeffrey Garren, spécialiste de la finance et du commerce à la Yale School of Management est ainsi obligé d’expliquer : « Il faut sans doute se rendre à l’évidence, nous assistons à la fin de la vague libérale déclenchée par Margaret Thatcher et renforcée par Ronald Reagan dans les années 1980. Au lieu de déréglementer et de privatiser, les États s’efforcent de reprendre le contrôle de leurs économies et par là même d’accroître leur influence sur le reste du monde. Un vent mauvais s’est levé (…). A la fin du XVIIIème siècle, le capitalisme a remplacé le féodalisme. Au XXème siècle, la liberté des marchés a remporté la mise. Aujourd’hui, le monde flirte avec une autre grande transformation de la philosophie et des règles du commerce mondial. Contrairement aux changements du passé, cette nouvelle trajectoire ne constitue pas un progrès » (Courrier International , N°899 du 24 au 30/01/08) ».

Trump et Elon Musk ont tenté d’opposer vainement la Silicon-Valley à Wall-Street dans un effort herculéen de sauver la domination de l’impérialisme US et son dollars sur le monde à coups de sanctions, de menaces de tarifs douaniers. Le trumpisme est une mobilisation de l’argent du contribuable étasunien pour maximiser directement les profits des actionnaires du capital financier et de contraindre à la dépendance du monde au dollars, c’est aussi la volonté de vassaliser les États, nations et peuples.

Trump et Elon Musk se sont séparés parce que Wall-Street et Silicon-Valley sont les deux faces d’une même médaille, celle de l’unité bourgeoise pour l’hégémonie de l’impérialisme yankee sur le monde. Trump l’a découvert à son dépens dans sa bravade tarifaire et douanière qui a fait pschitt.

La lutte des classes sous la forme du soulèvement anti-raciste en Californie a été précédée par des grèves générales des sans papiers pour montrer leur utilité sociale contre les propagandes xénophobes, puis par les manifestations de masses contre les crimes racistes, notamment policiers. Aujourd’hui donc on assiste à des révoltes populaires contre l’expulsion des migrants. Toutes ces luttes sont des jalons vers un soulèvement général aux États-Unis contre la décadence et la putréfaction du capitalisme impérialiste condamné à la fascisation à l’intérieur et aux sanctions et guerres à l’extérieur.

Les luttes de classe aux USA, en attendant de déboucher sur la révolution socialiste, peuvent produire un délitement, voire une implosion des États-Unis par la séparation d’États à majorité hispanique ou à majorité noire.

Alors ouvriers, paysans, travailleurs de toutes les nationalités étasuniennes, unissez-vous pour mettre à bas le système prédateur du stade suprême du capitalisme qu’est l’impérialisme hégémonique qui exploite l’humain et spolie la nature.

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