Interview de Mohamed Ali Zerouali, représentant en France du Front Polisario (PRC-20/05/25)

Jeudi 15 mai, tu as donné une conférence organisée par le Cercle Universitaire d’Études Marxistes de Sorbonne université sur : « Le colonialisme au Sahara Occidental : position de la France « . Cette conférence a été un succès et s’est déroulée dans un climat de dialogue et une volonté de comprendre la réalité de la situation. Les tentatives habituelles des autorités marocaines, par proxi interposés, de la faire interdire, comme de la perturber se sont révélées pour ce quelles étaient : des pétards mouillés. Notre première question sera donc consacrée à cette volonté des autorités marocaines d’étouffer tout débat sur la question du Sahara Occidental.

Question 1 : Ces tentatives d’intimidation sont-elles fréquentes ? Comment le Front Polisario y répond ?

Je tiens tout d’abord à remercier chaleureusement le Cercle Universitaire d’Études Marxistes de Sorbonne Université pour l’organisation de cette excellente conférence. Je salue leur engagement en faveur du débat critique et libre, ainsi que leur courage face aux pressions et tentatives d’intimidation orchestrées par l’ambassade du Maroc et ses relais. Leur refus de céder à ces manœuvres démontre que l’université reste un lieu de réflexion indépendante, où la vérité historique et politique peut s’exprimer.

Oui, ces tentatives sont malheureusement fréquentes. À chaque fois qu’un espace de parole est offert au peuple sahraoui, on assiste à une mobilisation frénétique des relais de la diplomatie marocaine pour faire taire cette voix. Ces pressions prennent diverses formes : interventions directes auprès des organisateurs, lettres officielles, campagnes de dénigrement ou tentatives de perturbation des événements.

Le Front Polisario y répond avec calme, fermeté et constance. Nous sommes une organisation légitime, reconnue par les Nations unies comme le représentant du peuple sahraoui. Nous comptons sur la force du droit international, sur notre attachement aux principes de la justice, et sur la solidarité croissante des peuples pour faire face à ces intimidations. Elles révèlent une chose : Rabat craint le débat, car il redoute que la vérité historique sur le Sahara Occidental soit connue.

Question 2 : Pourquoi l’indépendance du Sahara Occidental est-elle légitime ?

L’indépendance du Sahara Occidental est fondée sur un droit inaliénable : le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Ce droit est inscrit dans la Charte des Nations unies et confirmé par l’avis consultatif de la Cour internationale de justice de 1975, qui a clairement indiqué qu’il n’existait aucun lien de souveraineté entre le Maroc et le Sahara Occidental.

Depuis la fin du XIXe siècle, ce territoire a été soumis à la domination coloniale espagnole, dans le cadre du partage impérialiste de l’Afrique. Lorsque l’Espagne s’est retirée en 1975, elle l’a fait sans organiser de processus de décolonisation, laissant place à une invasion militaire marocaine. La République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD), proclamée en 1976, incarne la continuité de la lutte de libération, et elle est aujourd’hui membre fondateur de l’Union africaine et entretien des relations diplomatiques avec 84 Pays de par le monde. Notre cause est légitime car elle est conforme au droit international et portée par un peuple qui n’a jamais cessé de résister.

Question 3 : Quels sont les objectifs et les moyens d’action du Front Polisario ?

Le Front Polisario est à la fois un mouvement de libération nationale, un acteur politique reconnu et le gouvernement de la RASD. Notre objectif fondamental est l’indépendance totale du Sahara Occidental et la pleine souveraineté du peuple sahraoui sur son territoire.

Nos moyens d’action sont multiples :

  • Sur le plan diplomatique, nous agissons auprès des institutions internationales, des États, et des organisations de solidarité pour faire avancer notre cause.
  • Sur le plan juridique, nous utilisons les recours en justice, comme l’ont montré les décisions de la Cour de justice de l’Union européenne qui affirment que le Maroc et le Sahara Occidental sont deux territoires distincts.
  • Sur le terrain, nous assurons la gestion des camps de réfugiés sahraouis, organisons la vie sociale et politique, et maintenons notre présence dans les zones libérées.
  • Enfin, nous sommes toujours prêts à négocier une solution pacifique, dans le respect du droit de notre peuple à l’autodétermination et à l’indépendance.

Question 4 : Quelle est la position du Front Polisario face à l’attitude de la France ?

La position de la France est profondément problématique. En soutenant les thèses marocaines, Paris empêche toute avancée vers une solution juste. Ce soutien diplomatique, militaire et économique à la monarchie marocaine conforte Rabat dans son refus d’organiser le référendum d’autodétermination pourtant prévu par les Nations unies depuis 1992.

Nous déplorons que la France, pays des droits de l’homme, tourne le dos à ses principes lorsqu’il s’agit du Sahara Occidental. Cette posture contribue à prolonger le conflit, à bloquer le processus de paix et à faire obstacle à la justice. Le Front Polisario demande à la France, membre permanent du Conseil de Sécurité, de jouer un rôle constructif et impartial, en faveur du droit et de la paix.

Question 5 : Qu’en est-il du soutien en France et comment le renforcer ?

En France, le soutien existe, mais il doit être amplifié. Il vient de syndicats, de partis politiques, d’associations, d’universitaires, de journalistes, de citoyens engagés. Des collectifs comme l’ACAT, France Libertés, ou encore des sections locales de la CGT ou de la LDH ont pris position pour les droits du peuple sahraoui.

Mais ce soutien reste trop peu visible à l’échelle nationale. Pour faire plus, il faut :

  • Multiplier les conférences, projections, expositions et événements publics sur la question sahraouie.
  • Sensibiliser les jeunes, notamment dans les universités.
  • Travailler avec les élus pour faire pression sur le gouvernement français.
  • Intensifier les campagnes de boycott des produits issus de l’occupation.
  • Et surtout, créer des ponts entre luttes internationales : la cause sahraouie est celle de tous les peuples opprimés.

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Source: https://www.sitecommunistes.org/index.php/monde/afrique/3379-interview-de-mohamed-ali-zerouali-representant-en-france-du-front-polisario

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