
Des surveillants de la maison d’arrêt de Brest étaient mobilisés, ce mercredi 27 septembre, pour dénoncer leurs conditions de travail. Certains d’entre eux se sont confiés.
« Cela fait 33 ans que je suis surveillante de prison, et, si c’était à refaire, je ne choisirai sûrement pas ce métier ». Au fil des ans, cette femme de 50 ans a vu ses conditions de travail se dégrader. « Le comportement des détenus a énormément changé et, ces dernières années, il y a vraiment une recrudescence de la violence. Le manque de personnel n’arrange pas les choses. Les téléphones portables entrent très facilement dans l’établissement par les parachutages. Et parfois, s’il se passe quelque chose à l’intérieur de la maison d’arrêt, il arrive qu’un détenu prévienne quelqu’un à l’extérieur qui nous attend sur le parking ». Ses collègues, qui manifestent devant la maison d’arrêt de Brest ce mercredi 27 septembre 2023, acquiescent : toutes choisiraient un autre métier si elles le pouvaient. « Car la sécurité de l’emploi dans la fonction publique, on en revient vite ici ».
« Je suis parfois seule pour m’occuper de trois étages »
« Avant, on travaillait soit le matin, soit le soir, mais aujourd’hui, je n’ai plus de vie. J’enchaîne les journées ou les nuits de douze heures, et je suis souvent seule pour m’occuper des trois étages de l’espace dédié aux femmes. Le tout avec un gilet pare-balles très lourd sur le dos. Cet équipement est obligatoire depuis l’attaque à la prison de Condé-sur-Sarthe (où un détenu avec été attaqué au couteau, le 5 mars 2019, NDLR). Je fais des allers-retours dans les étages pour aller ouvrir à l’aumônier ou à la professeur de français qui arrivent, et je ne suis pas disponible pour les appels des détenus. Le manque de personnel nous nettement met en danger. Car quand nous ne sommes pas présents pour répondre aux besoins des prisonniers, la tension monte », se désole cette femme de 48 ans.
« Nous sommes aussi victimes de tabagisme passif et, dans notre profession, l’espérance de vie ne dépasse pas 62 ans. Avant, nous pouvions partir à la retraite à 50 ans, mais aujourd’hui, c’est à 58 ans. Moi, je n’en peux plus, alors je vais partir à 53 ans, même si je subis une décote de ma retraite ».
« Le comportement des détenus a énormément changé ces dernières années, il y a vraiment une recrudescence de la violence »
« On croise les doigts pour qu’il ne se passe rien »
Adossé au mur, un de leurs collègues, plus jeune, raconte les mêmes difficultés. « Notre métier n’est pas attractif. Qui veut venir travailler en prison, dans un climat de violence avec des insultes quotidiennes ? Personne ne veut plus faire ce métier, et cela n’est pas étonnant que les établissements pénitentiaires aient autant de difficultés à recruter. Ici, à Brest, certains jours, tous les postes de travail ne sont pas pourvus et on croise les doigts pour qu’il ne se passe rien ».
Un collègue qui a travaillé à la prison de Fresnes, en banlieue parisienne est d’accord : « Ici, le manque de personnel se ressent beaucoup plus que dans un grand établissement comme Fresnes ». Une surveillante qui travaille à l’infirmerie subit aussi cette situation. « La maison d’arrêt est une cocotte-minute qui siffle de partout. Je suis souvent seule à l’infirmerie, avec 150 détenus qui passent chaque jour sans être accompagnés par un surveillant. Il me faut quotidiennement gérer seule les énervements pour ne pas que la situation dégénère. C’est dur pour tout le personnel mais, malgré tout, il n’y a que très peu d’arrêts maladie, car nous sommes solidaires et nous ne voulons pas mettre nos collègues en difficulté ».
Auteur : Valérie Gozdik
Source : « La maison d’arrêt de Brest est une vraie cocotte-minute » | Le Télégramme (letelegramme.fr)
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