PLFSS : pire que Bayrou, Lecornu propose une cure à 7,1 milliards d’euros pour les patients (Huma.fr-15/10/25)

Le budget de la Sécurité sociale présenté par Sébastien Lecornu est encore plus austéritaire que le projet esquissé par François Bayrou. © Eric TSCHAEN/REA

Le projet de budget de la Sécurité sociale présenté mardi prévoit des économies supérieures à celles du plan Bayrou de cet été. Elles devraient percuter de plein fouet les usagers les plus fragiles.

Par Cécile Rousseau.

Une déflagration pour les malades. Profitant de l’attention focalisée sur la suspension de la réforme des retraites, le gouvernement a présenté, mardi, un projet de loi de finances de la Sécurité sociale (PLFSS) en forme de thérapie de choc pour les usagers.

Au plan Bayrou du 15 juillet qui prévoyait 5,5 milliards d’euros d’économies, déjà décrié pour sa dureté, succède un PLFSS qui va encore plus loin avec 7,1 milliards d’euros de coupes prévues. L’Objectif national des dépenses d’Assurance maladie (Oodam) est annoncé en hausse de seulement 1,6 %, dont + 0,9 % pour les soins de ville.

Une très faible évolution, d’un niveau jamais vu depuis quinze ans, et une sous-dotation, qui ne permettront pas d’absorber l’augmentation des dépenses liées au vieillissement de la population et à la recrudescence des maladies chroniques. Si la Fédération hospitalière de France (FHF) a réagi en dénonçant « un Ondam qui met en danger l’accès aux soins », et endemandant au moins + 3 %, la CGT estime, elle, qu’il faudrait + 10 % rien que pour maintenir l’existant.

Le reste à charge va exploser

Pas de surprise, en revanche, sur les mesures censées ramener le déficit à 17,4 milliards d’euros en 2026 (contre 23 milliards en 2025). Le doublement des franchises médicales sur les médicaments, les transports sanitaires et les actes paramédicaux, tout comme celui des participations forfaitaires (sur les consultations), va faire flamber le reste à charge des malades (hors femmes enceintes, enfants, etc. ).

Leur plafond annuel va aussi doubler passant de 50 à 100 euros par an. « C’est une catastrophe pour les patients, soupire Agnès Giannotti, présidente du syndicat de médecins généralistes MG France. Le renoncement aux soins, déjà en recrudescence, va s’aggraver. » Philippe Bergerot, président de la Ligue contre le cancer, s’inquiète des conséquences dévastatrices : « Ces annonces arrivent alors que nous sommes en plein Octobre rose. On sait que pour une femme victime d’un cancer du sein le reste à charge est de 1 400 euros par an en moyenne, donc ce doublement des franchises va empirer la situation. »

« Avoir un cancer, ce n’est pas quelque chose qu’on choisit »

Quant à la proposition qui vise à endiguer la multiplication des arrêts maladie, en limitant les primo-arrêts à quinze jours en ville et à un mois à l’hôpital, elle pourrait bien avoir l’effet inverse sur les comptes de l’Assurance maladie. « Ça ne va rien changer à la longueur totale de l’arrêt, glisse Agnès Giannotti. Si les patients ont besoin d’un mois, on leur prescrira. Mais ils devront revenir au bout de quinze jours pour se faire prolonger, donc cela va encore ajouter de l’activité aux généralistes et allonger les délais pour avoir un rendez-vous. Ces visites supplémentaires seront aussi remboursées par l’Assurance maladie, donc on voit mal où est l’économie. »

La refonte des critères d’entrée dans l’affection de longue durée (ALD), où les soins sont remboursés à presque 100 %, devrait concerner les personnes guéries ou en rémission. Pour Philippe Bergerot, cette piste ne rime à rien. « Lorsque la personne est en ALD, il existe déjà une ordonnance bi-zone : une partie concerne les médicaments en lien avec la maladie, remboursés à 100 %, et l’autre, ceux qui sont remboursés normalement. Il faudrait déjà l’appliquer avant de supprimer l’ALD dès la fin des traitements actifs. Pour les femmes touchées par le cancer du sein, on sait que cinq ans après, certaines sont encore sous hormonothérapie. Avoir un cancer, ce n’est pas quelque chose qu’on choisit donc il faut arrêter de les faire passer pour des fraudeurs. »

Les mutuelles devraient augmenter leurs tarifs

Si la majorité des économies repose sur les usagers, le doublement des franchises et des participations forfaitaires devant à eux seuls rapporter 2,3 milliards d’euros, les organismes complémentaires sont également mis à contribution par le biais d’une taxation exceptionnelle de 1 milliard d’euros. De quoi promettre de nouvelles augmentations de tarifs pour les assurés. 

Même si cela n’est pas chiffré dans le PLFSS, certaines rationalisations d’exonérations de cotisations patronales sont au programme. Probablement insuffisant pour compenser les 15 milliards d’euros par an d’exonérations en moyenne qui contribuent grandement à plomber les comptes de la Sécu.

Pour Christophe Prudhomme, urgentiste et représentant de la CGT à la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CNAM), le problème est double : « Si ces exonérations étaient compensées par l’État et donc figuraient sur son budget comme le prévoit la loi Veil (1994), on n’en serait pas là. Il faut surtout rappeler que si on supprimait ne serait-ce qu’un quart des exonérations de cotisations (notamment patronales), on pourrait réduire à néant le déficit de la Sécurité sociale. »

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Source: https://www.humanite.fr/social-et-economie/plfss/plfss-pire-que-bayrou-lecornu-propose-une-cure-a-71-milliards-deuros-pour-les-patients

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