
Lundi 25 août, François Bayrou a tenu une conférence de presse dans le cadre de la préparation du budget 2026 qui prévoit 44 milliards d’euros d’économies sur le dos de la population laborieuse, un montant destiné, rappelons-le, à financer en particulier « l’effort de guerre ».
Par Pierre VALDEMIENNE
Le Premier ministre a beau marteler que le problème central est le « surendettement », il ne faut pas oublier que le projet de budget 2026 préparé par ce gouvernement consacre 57,1 milliards d’euros au ministère des Armées – contre 32 milliards en 2017 – et devrait atteindre 64 milliards en 2027, soit un doublement en 10 ans : il s’agit bien de taper sur les « petites gens » pour entre autres faire tourner le volant d’entraînement que représente l’industrie d’armement, il n’y a pas la moindre ambiguïté là-dessus de la part d’Emmanuel Macron et de François Bayrou, ceux-là mêmes qui continuent de soutenir inlassablement Netanyahou qui massacre et affame la population palestinienne.
Une situation qui confirme, s’il en était besoin, l’importance du meeting international contre la guerre du 5 octobre, auxquels d’ores et déjà l’organisation anglaise Stop the War, Zarah Sultana (députée britannique, co-fondatrice avec Jeremy Corbyn de Your Party), Medea Benjamin (Codepink), Enya Amara (Movement for Black Lives) ou encore José Nivoi (responsable syndical des dockers de Gênes)… ont annoncé leur participation.
« La crise » (titre du journal patronal Les Échos, 26 août)
Archi-minoritaires, rejetés comme jamais1, et confrontés à la perspective, d’une part, du mouvement du 10 septembre qui, parce qu’il cherche à se doter des moyens de l’action efficace pour bloquer, rencontre un écho certain parmi la population et, d’autre part, de la motion de censure déposée par la France insoumise (LFI) le 23 septembre, Emmanuel Macron et François Bayrou se sont finalement résolus à prendre les devants et à engager un vote de confiance le 8 septembre.
« Pari à très hauts risques », « La crise », « Une situation catastrophique pour le pays », titrent les principaux quotidiens et éditorialistes de la bourgeoisie. L’inquiétude est palpable. Sauf surprise, François Bayrou ne passera pas la rentrée. Cette décision – prise manifestement en commun avec Emmanuel Macron – d’avancer la date de sa chute probable révèle une tentative désespérée de désamorcer la colère qui monte dans le pays autour des mesures de guerre sociale contenues dans le projet de budget 2026, dont la suppression des deux jours fériés concentre particulièrement le rejet2, et qui tend à se cristalliser autour du mouvement du 10 septembre. Y parviendront-ils ? Nous verrons bien.
Toujours est-il que c’est bel et bien le refus radical d’une très large majorité de la population laborieuse d’un budget exclusivement tourné vers la guerre et les riches, appuyé par LFI, force politique de masse, qui a précipité la décision du vote de confiance le 8 septembre. Tels sont les ingrédients principaux qui ordonnent la situation.
Les forces se disposent
Il n’en demeure pas moins que, face à ce refus, les forces se disposent : chacun mesure que, dans cette situation, se soumettre au vote de confiance exprime une crise que d’aucuns qualifient aujourd’hui de crise de régime. À peine l’annonce du vote de confiance était-elle faite que les principaux dirigeants du Parti socialiste (PS), Olivier Faure en tête, montaient au créneau pour défendre « un autre budget ». Au journal télévisé de 20 heures sur TFI (25 août), le premier secrétaire du PS a déclaré : « Nous allons, nous, présenter, dans les tout prochains jours, un projet de budget alternatif ».
Le député du PS de l’Essonne, Jérôme Guedj, en esquisse les contours (RTL, 25 août) : « Je souhaite que ce soit un Premier ministre issu de la gauche, qui soit capable de construire un gouvernement de front républicain, soutenu – avec ou pas participation – par une majorité à l’Assemblée nationale sur un programme de gouvernement. » En clair : refaire du Bayrou mais avec un Premier ministre « de gauche ». C’est d’ailleurs ce qu’a proposé Philippe Brun, député PS de l’Eure, il y a une dizaine de jours, lorsqu’il a défendu des économies budgétaires de l’ordre, non pas de 44 milliards, mais de 22 milliards.
Toutes ces dispositions ne sont d’ailleurs absolument pas incompatibles avec les déclarations de François Bayrou, qui a rappelé que toutes les mesures présentées le 15 juillet dernier sont « amendables, améliorables avec les partenaires sociaux et avec les parlementaires au moment du débat budgétaire. »
Qui ne voit pas que des millions n’en peuvent plus et expriment qu’il faut que ça change radicalement ?
De leur côté, les dirigeants des centrales syndicales ont décidé de se réunir plus tôt que prévu. L a confédération Force ouvrière avait déjà, dès le 25 juillet, posé un préavis de grève qui court du 1er septembre au 30 novembre. Et dès la fin de la conférence de presse du Premier ministre, a déclaré par voie de communiqué : « Sa conception (celle de François Bayrou, Ndlr ) de la justice sociale est en réalité une violence sociale inacceptable. Force ouvrière ne laissera pas faire. »
Vont-ils prendre ensemble la mesure de la situation ? Vont-ils chercher à enfermer le refus légitime dans des actions dont tout le monde sait qu’elles sont inefficaces ? Vont-ils se mettre au diapason des exigences de « stabilité » et se compromettre dans les petites combines dont la musique est déjà présente ? Le mieux serait qu’ils se mettent au diapason de l’état d’esprit réel des travailleurs et déjà de leurs propres troupes en se positionnant clairement et nettement, ensemble, pour la grève jusqu’à satisfaction, pour la grève, le blocage, le 10 septembre.
Qui ne voit pas, qui peut ne pas comprendre que des millions n’en peuvent plus de cette situation, en ont assez et expriment qu’il faut que ça change radicalement ? Qui peut ne pas entendre que ce ras-le-bol et cette colère sont légitimes ?
Le journal Les Échos (26 août) rappelle qu’en cette rentrée scolaire, des centaines de postes et plus de 2 000 classes seront fermés. Tout l’été, les services d’urgence ont été saturés comme à l’hôpital de Saint-Nazaire où des images ont été publiées par un pompier montrant des couloirs bondés de brancards en attente de soins. Le 5 septembre, les chauffeurs de taxi appellent à « mettre le pays à l’arrêt, pour que le gouvernement arrête de nous mépriser » selon les mots de Dominique Buisson, secrétaire général de la Fédération nationale du taxi, cité par l’AFP (25 août), qui rejette les nouvelles règles de tarification du transport des malades.
Pour que le pays ne soit pas précipité dans la décomposition, dans la déchéance et dans le chaos, il faut que Bayrou dégage, il faut que Macron dégage. Et le plus tôt sera le mieux.
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