Révolution Z au Maroc? (Observateur Continental – 03/10/25)

03.10.2025

Ce mouvement s’inspire de manifestations similaires au Népal où la génération Z a renversé le gouvernement en 2025 pour exiger l’accès aux réseaux sociaux et à des réformes.

Révolution Z. La «Révolution Z» ou «Génération Z 212» désigne des manifestations de masse menées par de jeunes Marocains qui secouent le pays depuis fin septembre 2025. Ce mouvement, né sur des plateformes numériques comme Discord, TikTok et Instagram, représente la plus grande mobilisation de jeunes depuis les manifestations du Rif de 2016-2017 et évoque des échos du Printemps arabe de 2011, mais avec une organisation moderne et anonyme.

Des milliers de jeunes, principalement issus de la génération Z (nés entre 1995 et 2010), sont descendus dans la rue pour réclamer des réformes urgentes dans l’éducation et la santé, dénonçant la corruption, le chômage et les priorités «pharaoniques» du gouvernement, comme la construction de stades pour la Coupe du monde 2030 au détriment des services de base.

Contexte et facteurs déclencheurs. Le Maroc est confronté à une profonde crise socio-économique qui touche de manière disproportionnée sa jeunesse qui représente près de 25% de la population (environ 8,2 millions de personnes âgées de 15 à 29 ans).

 «Au Maroc, le marché du travail connaît une instabilité chronique, en particulier pour les jeunes. Selon les données du Haut-Commissariat au Plan (HCP) relayées par la presse locale lundi 18 août dernier, le taux de chômage national a atteint 12,8% au deuxième trimestre 2025, avec un taux particulièrement élevé de 35,8% chez les 15–24 ans. Cette situation révèle les limites de l’Agence nationale de promotion de l’emploi et des compétences (ANAPEC), qui peine à jouer pleinement son rôle d’intermédiation et à s’imposer comme acteur central de l’insertion professionnelle», fait savoir Ecomnews Med

Cela entraîne l’émigration vers l’Europe. Le point d’orgue des manifestations a été la mort de huit femmes enceintes dans un hôpital public d’Agadir en septembre 2025, faute de services d’urgence, conjuguée au deuxième anniversaire du séisme de l’Atlas (8 septembre 2023), sans progrès dans la reconstruction. Ces événements mettent en lumière un Maroc à deux vitesses: des investissements de plusieurs millions de dollars dans des infrastructures telles que le train à grande vitesse et des stades modernes, tandis que l’accès aux hôpitaux, aux écoles et à l’eau potable est précaire dans les zones rurales et périphériques. Selon Le Monde citant l’OMS, «avec 30.000 médecins pour environ 40 millions d’habitants, le royaume affiche une densité de personnel soignant inférieure au seuil critique de 2,5 pour 1000 établi par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). En 2023, la Cour des comptes estimait qu’il manquait 47.000 médecins dans le royaume et que le déficit atteindrait les 53 000 d’ici à 2035».

Principales revendications. Les manifestants, organisés sous le hashtag #GenZ212 (en référence à l’indicatif téléphonique du Maroc), réclament: Des améliorations dans les domaines de la santé et de l’éducation: davantage d’investissements dans les hôpitaux et les écoles publics, plutôt que dans les projets sportifs ; La fin de la corruption : la transparence dans l’utilisation des fonds, tels que ceux destinés à la Coupe d’Afrique des Nations 2025 et à la Coupe du monde 2030 ; La justice sociale : la réduction du chômage des jeunes et le soutien aux victimes du tremblement de terre ; La libération des détenus: l’amnistie pour les personnes arrêtées lors de manifestations pacifiques.

Les principaux groupes incluent Gen Z 212, un groupe anonyme qui se définit comme un «espace de dialogue conscient pour les jeunes», et Morocco Youth Voices, qui utilise Discord pour coordonner des actions «pacifiques et civilisées».

Développement des manifestations. Début (28-29 septembre): Premiers rassemblements à Rabat, Casablanca, Tanger, Marrakech et Agadir, avec des milliers de participants. À Rabat, le groupe #GenZ212 a appelé à des marches, qui ont été réprimées, mais il a déclaré: «Ce n’est que le début d’une lutte pacifique». Escalade (30 septembre – 1er octobre): Pour le quatrième jour consécutif, les manifestations se sont étendues à des villes comme Témara, Inezgane, Béni Mellal, Fès, Kénitra et Tétouan. À Casablanca, 24 personnes ont été arrêtées pour avoir bloqué la circulation. À Rabat, la police a bouclé la capitale avec des centaines d’agents, poursuivant et arrêtant les manifestants un par un.

Affrontements: Le 30 septembre, de violents affrontements ont éclaté, les manifestants lançant des pierres et chargeant la police. Des dizaines de personnes ont été arrêtées au total, et des informations font état d’une répression brutale, notamment des passages à tabac et des transferts vers les commissariats de police.

Le mouvement a reçu le soutien de personnalités publiques: des rappeurs comme Raid et Houda Abouz, plus connu sous le nom de Khtek, la chanteuse Manal, l’actrice Saadia Ladib, la réalisatrice Naima Zitan, l’acteur Hassan Hammouch et le footballeur Azzedine Ounahi.

Perspectives. Le régime de Mohammed VI a réagi par la répression: dispersion des rassemblements, arrestations massives et contrôles stricts des rues. Les critiques y voient un «fardeau politique» plutôt qu’une véritable transition, dans un pays où la censure et la peur sont omniprésentes. Les organisations de défense des droits humains exigent la libération immédiate des personnes détenues et condamnent les violences policières. Ces manifestations remettent en cause le statu quo et montrent comment la génération Z, ironiquement surnommée «ceux qui voulaient juste jouer aux jeux vidéo», transforme l’indignation numérique en action de rue.

Germán Gorraiz López, analyste politique

Source : https://www.observateur-continental.fr/?module=articles&action=view&id=7292

URL de cet article : https://lherminerouge.fr/revolution-z-au-maroc-observateur-continental-03-10-25/

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